Pakistan : Recours excessif à la force et arrestation de défenseur⸱ses des droits humains et de manifestants pacifiques baloutches

Le 20 décembre 2023, les autorités pakistanaises d’Islamabad ont fait un usage excessif de la force, notamment en utilisant des gaz lacrymogènes, des matraques et des canons à eau contre des manifestants pacifiques participant à la « Longue marche baloutche » menée par des femmes contre la répression continue et les violations des droits humains, y compris les disparitions forcées, dans l’État du Baloutchistan. Les autorités ont empêché les manifestants d’entrer à Islamabad, passant à tabac et arrêtant un grand nombre d’entre eux, y compris des défenseur⸱ses des droits humains.

La longue marche baloutche est une campagne de protestation pacifique menée par des femmes qui a débuté le 6 décembre 2023. Cette campagne met en lumière les violations historiques et continues commises par les autorités pakistanaises à l’encontre de la communauté baloutche, notamment les disparitions forcées et involontaires, les exécutions extrajudiciaires, les détentions arbitraires et la torture. Les manifestants marchent depuis le 6 décembre 2023 dans le cadre d’une marche pacifique menée par des défenseuses des droits humains.

Le 20 décembre, la police pakistanaise et les autorités de l’État ont empêché les manifestants baloutches pacifiques de se rendre à Islamabad et ont érigé des barricades pour les en empêcher. Dans la nuit du 20 décembre, la police a employé une force excessive et brutale contre les manifestants, parmi lesquels se trouvaient des personnes âgées et des mineurs. Il y avait aussi des défenseur⸱ses des droits humains, notamment des familles de disparus baloutches qui militent depuis des années pour connaître la vérité sur leurs proches, pour obtenir leur libération et pour obtenir réparation pour les violations dont ils sont victimes. Au lieu d’accéder aux appels pour mettre fin aux violations, les autorités de l’État ont choisi de perpétrer un schéma de violence brutale et d’arrestation contre les manifestants, dont beaucoup sont blessés, et dont environ 226 sont toujours en prison.

Front Line Defenders est extrêmement préoccupée par la sécurité des personnes arrêtées, notamment la défenseuse des droits humains Mahrang Baloch qui partage publiquement les représailles auxquelles les manifestants sont confrontés, y compris les arrestations massives. Front Line Defenders pense que l’arrestation de ces manifestants est un acte de représailles contre leur travail pacifique en faveur des droits humains et l’exercice de leur droit légitime à manifester pacifiquement. Compte tenu des antécédents de criminalisation, d’abus des lois antiterroristes et de la violence en détention, nous sommes profondément inquiets pour la sécurité de toutes les personnes détenues. Nous sommes également préoccupés par la possibilité de représailles, y compris la surveillance, les fausses affaires judiciaires, les raids et d’autres formes de violence contre la communauté des droits humains baloutche, en guise de punition pour leur soutien ou leur participation à la Longue Marche.

Front Line Defenders exhorte les autorités pakistanaises à :

• Libérer immédiatement les personnes actuellement détenues et abandonner toutes les poursuites judiciaires à leur encontre ;
• Ouvrir des enquêtes impartiales et efficaces sur le recours excessif à la force contre les manifestants pacifiques, y compris les défenseur⸱ses des droits humains, en vue d’obliger les responsables à rendre des comptes et de publier les conclusions de ces enquêtes ;
• Garantir un engagement crédible auprès de la communauté des droits humains baloutche et de ceux qui participent à la Longue marche pacifique baloutche afin de répondre à leurs griefs légitimes ;
• Veiller à ce que tous les défenseur⸱ses des droits humains au Pakistan, y compris celles et ceux qui appartiennent à des communautés minoritaires traditionnellement opprimées comme la communauté baloutche, se voient garantir le droit de mener à bien leurs actions en faveur des droits humains dans un environnement sûr, sans crainte de représailles et de violence.