Déclaration — Mexique : Inquiétude au sujet des attaques et du harcèlement à l’encontre du Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua
Les membres du Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua sont harcelés et agressés en raison de leur travail collectif pour protéger les droits humains en contestant la construction de l’usine de Chemours Laguna. Il s’agissait d’une méga-usine chimique industrielle pour la production de cyanure de sodium, construite dans la ville de Dinamita, État de Durango en 2017. Malgré le démantèlement de l’usine chimique, le Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua continue de subir des représailles en raison de son travail en faveur des droits humains.
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Le 2 février 2023, des individus armés sont entrés de force dans la maison du défenseur des droits humains Cristóbal González Estrada, membre du groupe Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua. Les individus armés ont fait une descente chez lui et ont agressé physiquement ses enfants de 14 et 12 ans.
Les agressions contre Cristóbal González Estrada et sa famille surviennent après l’enlèvement d’un autre membre du même groupe, le défenseur des droits humains Servando Delgado Rentería, le 25 janvier 2023. Depuis 2017, les communautés touchées sont victimes d’intimidation et de harcèlement répétés par des individus armés. Ces auteurs ont été vus autour de ces communautés, au volant de fourgonnettes blanches sans plaque d’immatriculation.
Depuis 2017, 21 communautés affectées dans la municipalité de Gómez Palacio, Durango, ont formé le Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua, dans le but de protéger leur territoire contre la construction de l’usine de cyanure de sodium dans la ville de Dinamita, Durango. L’usine chimique de Chemours Laguna est un projet développé par The Chemours Company Mexicana, dont le but, selon l’entreprise et les autorités locales, était de « réduire le temps et la distance de fourniture des intrants à l’industrie mexicaine » en réduisant les importations de cyanure de sodium. Ils ont également cherché à soutenir la croissance de l’industrie minière de l’or et de l’argent au Mexique. L’usine de Chemours Laguna devait produire 65 000 tonnes de cyanure de sodium par an.
La Chemours Company Mexico a fait deux tentatives pour installer l’usine dans l’État de Guanajuato en 2016. Cependant, la réponse de la société civile et le refus du permis d’utilisation des terres par les autorités municipales ont amené l’entreprise à soumettre sa proposition à une autre autorité municipale, celle de l’État de Durango (Secretaría del Medio Ambiente y Recursos Naturales-SEMARNAT) en mars 2017. Le projet a été approuvé deux mois plus tard, et, le 24 juin 2017, son lancement a été annoncé à l’insu ou sans le consentement préalable des communautés touchées.
Le Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua a été formé en juillet 2017 et en août de la même année, ils se sont présentés devant la Cour fédérale de justice administrative et ont déposé un recours en nullité contre la résolution qui a approuvé le projet. En L’absence de réponse de la Cour, le 9 mars 2018, le Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua a manifesté pacifiquement contre la construction de l’usine. La manifestation a rassemblé près de 1000 personnes. L’administration locale a réagi en réprimant cette manifestation, qui a abouti à 49 arrestations arbitraires, dont 5 mineurs et 10 femmes, et 10 personnes ont été hospitalisées.
Le 13 mars 2018, un appel constitutionnel a été déposé devant le tribunal du troisième district de La Laguna, ordonnant la suspension définitive du projet. Cette ordonnance de suspension a ensuite été révoquée par un tribunal collégial de Torreon, et l’entreprise a repris ses travaux en mai 2020. Malgré l’expiration des permis municipaux pendant la période de suspension, ces travaux se sont poursuivis. Face à cette situation, le Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua a établi deux camps de protestation sur le site, afin d’empêcher la poursuite des travaux.
Enfin, en octobre 2020, la Cour fédérale d’administration a statué à l’unanimité sur la nullité de l’autorisation d’impact environnemental du projet Chemours Laguna. Le 1er décembre 2021, The Chemours Company a annoncé la vente de l’entreprise à une société tchèque spécialisée dans la production de cyanure, Draslovka Holding a. s.
Alors qu’aucun incident irrémédiable ne s’est produit depuis les événements de la manifestation de 2017, les membres du Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua continuent d’être persécutés, harcelés et attaqués par les autorités locales. Ces autorités promeuvent un récit dans lequel elles taxent le Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua de rétrograde et d’être contre le développement, et affirment qu’il s’oppose à un projet qui prétend être bénéfique pour l’amélioration des possibilités d’emploi pour la communauté. Compte tenu du démantèlement de l’usine et du départ de l’entreprise du territoire, Front Line Defenders réitère l’importance de garantir la sécurité des membres du Frente Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua qui défendent légitimement leur territoire et dénoncent l’impact environnemental négatif de ce projet.
Front Line Defenders exprime sa préoccupation face aux agressions et au harcèlement du Front Unido de Pueblos de la Laguna en Defensa de la Vida, el Territorio y el Agua, car tout cela semble lié à leur activité légitime en faveur des droits humains et de l’environnement. Front Line Defenders réitère son inquiétude concernant le climat d’impunité et le manque de protection des défenseur⸱ses des droits humains au Mexique.