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5 Octobre 2020

Des organisations internationales appellent à mettre fin à la violence et à l'impunité contre les défenseurs des droits humains autochtones

  • L'année dernière en mars, le leader indigène Sergio Rojas a été assassiné chez lui de 15 balles dans le corps. Cette attaque brutale avait provoqué un tollé international et avait été largement condamnée. La semaine dernière, l'État du Costa Rica, généralement considéré comme un leader dans le domaine des droits humains dans l'hémisphère, a annoncé de manière inattendue qu'il allait fermer l'affaire et archiver toute la documentation, bien que les auteurs n'aient été ni arrêtés ni punis.
  • Compte tenu du contexte de violence et d'impunité auquel sont confrontés les défenseur-ses autochtones au Costa Rica, les organisations nationales et internationales demandent au Gouvernement costaricain de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à l'impunité et à la violence.

Les organisations de défense des droits humain ci-dessous se déclarent profondément préoccupées par la situation d’impunité structurelle qui existe au Costa Rica à l’égard des défenseurs des droits des peuples autochtones. La réponse officielle aux menaces, au harcèlement, à la violence et aux homicides répétés auxquels les dirigeants autochtones et les défenseurs des droits humains sont actuellement confrontés dans le pays continue d'être caractérisée par l'impunité. L'impunité met en danger la vie de tous les défenseur-ses des droits humains au Costa Rica.

 

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Depuis 2012, des organisations nationales et internationales de défense des droits humains documentent et dénoncent plusieurs cas de violence et d'impunité contre les défenseur-ses des droits humains Bribri et Brörán à Térraba et Salitre, des territoires situés dans la région sud du Costa Rica. Dans ce contexte de violence croissante contre les Bribri et Brörán, et leurs efforts continus pour dénoncer les violations devant les instances nationales et internationales, les communautés avaient obtenu des mesures de précaution internationales (MC-312-12) par la Commission interaméricaine des droits humains (CIDH ). Cependant, ces mesures ne sont pas respectées ou mises en place. Depuis 2019, deux membres de la communauté ont été tués et des dizaines d'autres ont été abattus, grièvement blessés, expulsés de force et menacés de mort.

En mars 2019, Sergio Rojas, leader autochtone Bribri qui défendait les droits des populations autochtones contre l'occupation illégale de leur territoire, a été assassiné. À ce moment-là, Sergio Rojas bénéficiait des mesures de précaution de la CIDH. Le 24 septembre, le parquet a informé la famille de Sergio de sa décision de clore l'enquête, bien qu'elle ait été brève et insuffisante. Le parquet affirme qu'il n'a pas été possible d'identifier l'accusé. Cette action a essentiellement garanti l’impunité des responsables et est contraire au devoir de l’État d’identifier et de punir les auteurs matériels et intellectuels du crime.

Depuis l'assassinat de Sergio Rojas, les communautés autochtones sur les territoires indigènes de Salitre, Térraba, Cabagra, China Kichá, Maleku et autres subissent une hausse des attaques. Cependant, ces communautés rencontrent des obstacles importants pour obtenir justice. Les enquêtes sont insuffisantes, la protection n'est pas accordée aux victimes ou aux témoins de crimes, des mesures de précaution efficaces telles que la détention préventive ne sont pas imposées aux agresseurs et aucun des responsables de l'une des violations ci-dessus n'a été condamné. Par conséquent, l'impunité structurelle de l'État contribue à ce que ces attaques se reproduisent contre les défenseur-ses des droits humains sur leurs territoires.

En février 2020, un deuxième bénéficiaire des mesures de précaution de la CIDH et chef indigène Brörán, Jehry Rivera, a été tué alors qu'il défendait pacifiquement ses terres ancestrales. Il est décédé en présence de la police, qui n'est pas intervenue lorsque les coupables l'ont attaqué. Bien qu'ils ait avoué le crime, les auteurs ont été libérés et n'ont pas été accusés. En outre, sa famille et les principaux témoins de l’affaire ont subi diverses menaces et agressions, qui n’ont pas fait l’objet d’une enquête, et aucune mesure de protection adéquate en leur faveur n’a été mise en place.

Pablo Sibar, leader communautaire Bröran, également bénéficiaire de mesures de précaution de la CIDH, a été menacé de mort et agressé physiquement à plusieurs reprises à cause de son travail de promotion des initiatives de résistance pacifique pour la restitution des terres autochtones. Les menaces et les agressions ont augmenté depuis mars 2020. Il n'y a pas eu d'enquête correcte et elles restent impunies.

Minor Ortíz, défenseur indigène Bribri, est fréquemment victime de menaces de mort et d'agressions, dont au moins six tentatives de meurtre. Suite à la dernière tentative de meurtre en mars 2020, au cours de laquelle il a reçu une balle dans la jambe, l'auteur a été relâché et a seulement reçu l'ordre de rester à une certaine distance de Minor Ortíz ce qu'il n'a pas respecté. Malgré les nombreuses plaintes formelles déposées auprès des autorités et les signalements de menaces de mort contre Minor et sa famille, l'État n'a toujours pas mis en place de mesures concrètes pour protéger leur vie et leur intégrité.

De même, divers rapports et plaintes ont été portés aux niveaux national et international, en lien avec les attaques subies par des femmes leaders défendant les droits de leurs territoires Bribri et Brörán. Le 12 juillet 2019, une femme leader a été aspergée de produits chimiques au visage et au moins deux défenseuses ont déclaré avoir été menacées avec des armes sur leur territoire.

Nous sommes profondément préoccupés par le fait qu’à ce jour, l’État du Costa Rica n’a traduit en justice aucun auteur de violences contre les populations Bribri et Brörán.

Nous appelons le Gouvernement costaricain à mener des enquêtes immédiates, exhaustives et impartiales en vue d'identifier et de tenir pour responsables les personnes coupables des attaques persistantes, des meurtres et des menaces contre les défenseur-ses autochtones.

Nous exhortons l'Etat du Costa Rica à rouvrir l'affaire de Sergio Rojas et à respecter son devoir et son obligation de punir les agresseurs.

Nous appelons l’État à mener des enquêtes efficaces et transparentes visant à révéler l’ampleur de ces attaques et à engager des poursuites et des sanctions proportionnelles pour tous les actes de violence et les menaces contre tous les défenseur-ses des droits humains conformément aux normes internationales.

Le Costa Rica héberge la Cour interaméricaine des droits humains, un pilier des droits humains dans la région. Mais cet honneur s'accompagne de l'obligation de démontrer que les défenseur-ses des droits humains sont en sécurité au sein de ses frontières. L'impunité ne peut être tolérée.

Liste des organisations qui soutiennent cette déclaration

Agora Association, Turquie
AIDA Americas
Arraigo ONG, Costa Rica
Asia Indigenous Peoples Pact (AIPP)
Asociación Paz y Esperanza, Pérou
Asociación Servicios Educativos Rurales, Pérou
Center for International Environmental Law (CIEL)
Business & Human Rights Resource Centre
Centro de Investigación y Defensa Sur (CIDSUR), Chili
Centro por la Justicia y el Derechos Internacional (CEJIL)
Chirapaq, Centro de Culturas Indígenas del Perú, Pérou
Comisión Intereclesial de Justicia y Paz, Colombie
Continental Network of Indigenous Women of the Americas (ECMIA)
Corporación La Caleta, Chili
Culture Hack Labs
Due Process of Law Foundation (DPLF)
Emmaus Aurinkotehdas ry, Finlande
Environmental Defender Law Center (EDLC)
Environmental Justice Foundation (EJF)
Federación por la Autodeterminación de los Pueblos Indígenas (FAPI)
Forest Peoples Programme (FPP)
Front Line Defenders (FLD)
groundWork, Friends of the Earth, Afrique du Sud
Indigenous Peoples Movement for Self Determination and Liberation (IPMSDL)
Iniciativa Mesoamericana de Mujeres Defensoras de Derechos Humanos (IM-Defensoras)
Instituto Internacional de Responsabilidad Social y Derechos Humanos (IIRESODH)
International Indigenous Peoples Movement for Self-Determination & Liberation (IPMSDL)
Lawyers' Association for Human Rights of Nepalese Indigenous Peoples (LAHURNIP)
Lawyers' Committee for Human Rights, YUCOM, Serbie
Legal Resources Centre
Londres 38, Chili
National Alliance of People's Movements of India
New Wind Association, Finlande
Observatorio para la Protección de los Defensores de los Derechos Humanos (FIDH-OMCT)
Organización Fraternal Negra Hondureña OFRANEH, Honduras
Oyu Tolgoi Watch and Rivers without Boundaries Coalition, Mongolie
Open Briefing
Porgera Red Wara (River) Women's Association Incorporated (PRWWA INC.), Papua New Guinea
Project HEARD
Protection International Mesoamérica
Public Association “Dignity”
Rainforest Fund
International Network of Human Rights
RESAMA - Red Sudamericana para las Migraciones Ambientales
Sisters' Arab Forum for Human Rights (SAF), Yemen
Success Capital

* Dr. Marco Guevara Berger, catedrático, Universidad de Costa Rica

* Prafulla Samantara (Lauréat du Goldman Environmental Prize 2017 pour l'Asie) 

* Pofesora Xinia Zuñiga Muñoz, Investigadora Cicde- Uned y Ucrea, Universidad de Costa Rica