Mission internationale au Guatemala sur les exactions contre les défenseur-ses du droit à la terre et de l'environnement
En tant que représentants de la Coalition internationale pour l'accès à la terre (ILC), de Front Line Defenders et de CIVICUS, accompagnés de Pastoral de la Tierra et d'UDEFEGUA, nous avons passé la semaine dernière à nous rendre dans des communautés et à parler avec des représentants locaux et nationaux du gouvernement, des institutions relatives aux droits humains et des partenaires internationaux dans le domaine du développement.
Le message que nous avons entendu des défenseur-ses du droit à la terre et de l'environnement dans tout le Guatemala est: "Nous ne sommes pas des criminels, nous ne sommes pas des meurtriers, nous voulons simplement travailler nos terres et nourrir nos famille". Nous soutenons votre affirmation.
Nous pensons que, à ce jour, le gouvernement guatémaltèque n'a pas été en mesure d'apporter des réponses efficaces pour protéger les DDH en danger ou pour enquêter sur les crimes dont ils sont victimes. L'inaction du gouvernement crée des conditions propices à un climat de violence dans lequel les défenseur-ses des droits humains peuvent être tués en toute impunité. Selon nous, il est profondément inquiétant que les actes de violence contre les DDH ne soient pas des actes isolés et soient devenus un schéma persistant de persécution.
Non seulement l'État ne défend pas les droits humains fondamentaux, mais il contribue activement à démanteler les institutions existantes et les mécanismes de protection. Nous pensons que le gouvernement guatémaltèque n'a pas été en mesure d'apporter des réponses efficaces pour protéger les DDH en danger ou pour enquêter sur les crimes dont ils sont victimes. Au lieu de défendre les droits humains des personnes et des communautés, le système judiciaire est utilisé pour promouvoir les intérêts de groupes étatiques ou non étatiques puissants contre les intérêts des communautés locales, souvent par le biais de la corruption. De très nombreux acteurs au Guatemala nous ont informés que le système démocratique ne fonctionne plus. Lors de nos rencontres avec les communautés, nous avons entendu sans cesse parler de leur sentiment d'abandon de la part de l'État. Les journalistes des communautés qui dénoncent la réalité brutale sont désormais pris pour cible.
L'accès à la terre, à l'eau et aux ressources naturelles est à la racine du conflit social. Il est évident que l'État du Guatemala a choisi de donner la priorité à un modèle économique de développement rural qui enrichi quelques-un au détriment des communautés qui s'appauvrissent, tout en encourageant l'émigration et en détruisant l'environnement.
Le gouvernement guatémaltèque doit clairement choisir entre s'atteler à ces questions dans le cadre d'un processus de construction d'une société plus juste et égalitaire, ou de maintenir le statut quo, ce qui conduira à une plus grande polarisation et à des difficultés économiques pour le peuple du Guatemala. Le point de départ pour construire un modèle de développement rural plus inclusif est le consentement libre, préalable et éclairé des populations autochtones et des communautés locales. Pour que les consultations en toute bonne foi aient de la valeur, la population doit avoir confiance et savoir que le gouvernement agira sur la base des accords passés avec les communautés. Il est également urgent de mettre fin à la stigmatisation des défenseur-ses des droits humains et de reconnaitre leur rôle légitime et positif.
Nous avons été profondément impressionnés tout au long de cette mission par la capacité de résilience et le courage des femmes et des hommes leaders communautaires à travers le Guatemala, qui travaillent sans peur pour l'amélioration des conditions de la population et qui espèrent toujours que le gouvernement les entendra. Nous reconnaissons le rôle fondamental joué par l'Ombudsman des droits humains (PDH), la cour constitutionnelle et la Commission internationale contre l'impunité au Guatemala (CICIG) pour la défense des normes internationales relatives aux droits humains.
"Nous exhortons le gouvernement et la communauté internationale à reconnaitre et soutenir le rôle crucial des leaders communautaires et la nécessité qu'ils soient inclus dans la définition et l'application de modèles de développement économique durable et équitable; il est aussi essentiel que leurs droits à la terre, au territoire et aux ressources naturelles soient reconnus et protégés", a déclaré Michael Taylor de la Coalition internationale pour l'accès à la terre.
"Depuis l'année dernière, les défenseur-ses des droits humains sont harcelés et tués en toute impunité. Tandis que nous saluons l'annonce du procureur général concernant les progrès pour identifier les assassins de Juana Raymundo, il est important que ceux qui ont orchestré ce crime soient aussi traduits en justice. Nous espérons que la même attention sera portée aux 17 autres affaires de défenseur-ses des droits humains qui ont été assassinés depuis janvier dernier", a déclaré James Loughran de Front Line Defenders.