Se battre et être femme: Les attaques basées sur le genre contre les femmes défenseuses des droits humains
"Je suis absolument convaincue que si j'étais un homme, ce niveau d'agression ne serait pas si violent".
- Berta Cáceres
Deux ans avant d'âtre assassinée, la défenseuse écologiste Berta Cáceres avait dit à un journaliste de Grist que c'est son sexe autant que son travail qui mettait sa vie en danger.
À travers le monde, les femmes défenseuses des droits humains (FDDH) sont confrontées à des risques extrêmes et à un haut niveau de violence à cause de leur genre, lorsqu'elles promeuvent et protègent les droits de leurs communautés.
Les attaques qu'elles subissent ont souvent un caractère plus sexuel et sont plus stigmatisantes que celles perpétrées contre les hommes défenseurs. Lorsqu'une femme défenseuse est tuée, les autorités locales et les médias tendant à dissocier son meurtre de son travail en faveur des droits humains, dans le but de minimiser l'importance de sa mort et de sa vie.
Les FDDH rencontrent aussi plusieurs barrières pour obtenir justice après une attaque.
1. Les corporations multinationales qui attaquent les FDDH agissent régulièrement avec l'accort ou la complicité des autorités locales.
D'autres sont soutenues par les groupes du crime organisé liés aux gouvernements, les chances d'une intervention ou d'une protection de la police sont faibles.
2. Les attaques contre les FDDH qui sont perpétrées par des hommes membres de leur famille ne sont pas vraiment considérées.
Les policiers considèrent souvent ces attaques comme des "violences domestiques" ou disent aux FDDH que c'est une "question familiale privée".
Une étude de MesoAmerican Initiative of Women Human Rights Defenders montre que de 2012 à 2014, au moins 5% des agressions contre les FDDH ont été perpétrées "au sein de l'environnement immédiat des FDDH", principalement par des membres de la famille et des collègues.
3. Dans certains pays, les policiers eux-mêmes sont souvent les agresseurs.
Le jour où elle a reçu un produit chimique semblable à de l'acide au visage, la FDDH indienne Soni Sori a déclaré:
Le samedi, j'ai reçu un appel à 18h12 disant que certaines personnes complotaient pour m'attaquer. On me rappelait constamment que la police cherchait à m'éliminer. Mais je pensais que la police et les politiciens se battraient de toute façon, et j'ai ignoré ces avertissements. La plupart de mon combat est principalement contre la police de Bastar.
On me rappelait constamment que la police cherchait à m'éliminer.
- Soni Sori
L'impunité permet la violence contre les femmes défenseuses des droits humains (VCFDDH) dans de nombreux pays. À travers le monde, les cas de violence contre les femmes et les attaques contre les DDH sont peu signalées, les enquêtes sont bâclées et il y a peu de résultats dans la justice. Par conséquent, les FDDH font face à des obstacles énormes pour que les attaques soient reconnues et qu'il y ait des poursuites.
L'impunité en cas de VCFDDH découle également d'une fausse croyance: pour certains, les violences liées au genre et les violences contre les défenseur-ses des droits humains s'excluent mutuellement.
Pourtant, les deux sont inextricablement liées. Les attaques contre les FDDH sont motivées par leur travail et par leur genre.
En tant que défenseuses des droits humains, elles endurent des attaques qui sont traditionnellement perpétrées contre les femmes, comme le viol, les campagnes de diffamation liées au sexe et les attaques à l'acide.
En tant que femmes, elles endurent des attaques et des actes de harcèlement communs à tous les défenseur-ses des droits humains, tels que les menaces, les intimidations, l'acharnement judiciaire et les meurtres.
Les identités de "femme" et de "défenseuse des droits humains" sont uniques et s'entrecoupent, et les FDDH occupent une place au croisement de ces identités qui menace leur vie.
Mon visage brûlé à l'acide est le visage de la lutte.
- Soni Sori
A l'occasion de la Journée de la femme, Front Line Defenders honore trois défenseuses des droits humains qui ont font face à une violence extrême basée sur leur genre visant à mettre fin à leur travail important.
Soni Sori en Inde, Hana Shams Ahmed au Bangladesh, et la regrettée Berta Cáceres au Honduras , ont risqué leurs vies pour défendre les droits humains et pour elles, nous demandons justice et protection.
"Nous sommes des femmes qui réclamons notre droit à la souveraineté de notre corps, de nos pensées et de nos croyances politiques, et nos droits culturels et spirituels, et bien entendu l'agression est plus forte".
- Berta Cáceres