Trois figures exceptionnelles et pionnières du mouvement des droits humains au Venezuela, au Tchad, et au Cachemire, recevront le Prix Martin Ennals 2023
Genève, le 19 janvier 2023 - Un jury composé de dix des plus importantes ONG de défense des droits humains dans le monde – Amnistie Internationale, Human Rights Watch, la Fédération internationale des droits de l’homme, Huridocs, Pain pour le monde, Human Rights First, l’Organisation mondiale contre la torture, la Commission internationale de juristes (CIJ), le Service international pour les droits de l’homme (SIDH) et Front Line Defenders – a sélectionné, après une longue période de délibération, les trois défenseur-euse-s des droits humains qui, selon lui, méritent d’être reconnu-e-s et honoré-e-s par le Prix de 2023.
Delphine Djiraibé (Tchad), Feliciano Reyna (Venezuela) et Khurram Parvez (Cachemire), les lauréat-e-s de 2023, partagent le même courage, la même passion et la même détermination pour faire entendre la voix des sans-voix sur la scène internationale, en dépit des défis permanents qu’ils doivent relever, parfois au risque de leur vie.
« Nous sommes particulièrement fiers d’honorer ces trois lauréat-e-s exceptionnel-le-s qui ont consacré plus de 30 ans de leur vie à créer des mouvements qui rendent justice aux victimes ou fournissent des médicaments aux populations marginalisées. Ils ont fait des droits humains une réalité pour des milliers de personnes dans leur pays. »
– Hans Thoolen, Président du Jury du Prix Martin Ennals
Les trois lauréat-e-s du Prix Martin Ennals 2023 :
L’une des premières avocates du Tchad, Delphine Kemneloum Djiraibé est une pionnière du mouvement des droits humains dans l’un des pays les plus pauvres du monde, gangrené par la corruption et les violations des droits humains. Convaincue que son rôle est de « défier le pouvoir », Delphine défend depuis plus de 30 ans la cause des victimes et le processus démocratique. Elle a joué un rôle clé dans la traduction en justice de l’ancien dictateur Hissène Habré. Me Djiraibé dirige l’organisation non gouvernementale Public Interest Law Center (PILC), laquelle forme des bénévoles et accompagne les citoyen-ne-s qui cherchent à obtenir justice pour les violations de leurs droits. Ces dernières années, elle a été particulièrement active dans la lutte contre les violences sexistes et elle est en train de créer le premier centre de soutien psychologique pour les femmes au Tchad, qui comprendra un abri d’urgence pour les femmes victimes de violences domestiques.
Feliciano Reyna : Après la mort de son partenaire Rafael, décédé en 1995 à cause du sida, Feliciano Reyna, alors architecte, a fondé Acción Solidaria pour fournir des médicaments et des traitements indispensables aux Vénézuéliens vivant avec le VIH et le sida. Feliciano et Acción Solidaria ont commencé à défendre l’accès à la santé pour les LGBTQI, une population marginalisée dans un pays où les services de santé étaient en déclin et la corruption en hausse. Ils ont créé la première ligne d’assistance nationale sur le sida au Venezuela et ont mené une campagne nationale de sensibilisation, qui a été diffusée à la télévision et dans les cinémas, et qui a bénéficié d’une couverture à la radio et dans les magazines. Feliciano Reyna a ensuite fondé CODEVIDA, une coalition d’organisations vénézuéliennes qui défendent les droits des citoyens à la santé et à la vie. Il explique : « Nous avons été directement plongés dans toute la complexité de la crise humanitaire du Venezuela ». Malgré les menaces permanentes, il travaille, depuis 2006, en étroite collaboration avec les mécanismes de l’ONU pour défendre les droits humains dans son pays. En 2019, son effort de plaidoyer a contribué à la création de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur le Venezuela.
Khurram Parvez : C’est à l’âge de treize ans, lorsqu’il est témoin de l’assassinat de son grand-père lors d’une manifestation organisée pour protester contre les mauvais traitements infligés aux femmes devant sa maison au Cachemire, que Khurram Parvez fait le choix de « ne pas prendre part à des actes d’incitation à la violence et de vengeance », mais plutôt de devenir un « militant non violent ». Il a fondé la Coalition de la société civile de l’État de Jammu-et-Cachemire (JKCCS) et préside la Fédération asiatique contre les disparitions involontaires. Pendant quinze ans, il a voyagé dans les zones les plus reculées de la région pour parler aux victimes d’abus, recueillir des informations, documenter et rapporter leurs histoires. Sous sa direction, la JKCCS s’est montrée très efficace pour traduire dans la réalité locale les protections garanties par le droit international des droits humains. Malgré les attaques continues du gouvernement indien contre son droit à la liberté d’expression, son emprisonnement en 2016 et la perte d’une jambe en raison d’une blessure causée par une mine antipersonnel, Khurram continue inlassablement de faire entendre la vérité et représente une source d’inspiration pour la société civile et la population locale. En novembre 2021, il a été arrêté en vertu de la Loi relative à la prévention des activités illégales (UAPA) sur la base d’accusations motivées par des considérations politiques. Il est encore détenu sans procès en Inde.
Le Prix Martin Ennals
Créé en 1992, le Prix Martin Ennals (PME) est un prix annuel qui apporte reconnaissance, soutien et protection à des défenseur-euse-s des droits humains du monde entier. Le Prix donne une visibilité aux lauréat-e-s et met en lumière la situation des droits humains dans leur pays.
La cérémonie du PME, organisée conjointement avec la Ville de Genève, aura lieu le 16 février 2023 à la salle communale de Plainpalais. Diffusée en direct, la cérémonie attire d’un large publique local et international des supporters des droits humains, venus participer à un événement inspirant qui célèbre les accomplissements et l’engagement des activistes exceptionnels.