Les défenseur⸱ses des droits humains afghans menacés de retour forcé
Front Line Defenders est profondément préoccupée par la menace de retour forcé des défenseur⸱ses des droits humains (DDH) afghans en danger qui ont trouvé refuge au Pakistan, en particulier après la prise de pouvoir par les Talibans en août 2021. Les défenseur⸱ses des droits humains confrontés à des représailles à cause de leur action en faveur des droits humains en Afghanistan ont été contraints de fuir leur domicile et d’entrer dans les pays voisins pour y trouver refuge et se mettre en sécurité. Front Line Defenders a appelé à plusieurs reprises à protéger et à sécuriser les défenseur·ses restés dans les pays voisins qui ne peuvent pas se protéger efficacement notamment contre un retour forcé.
Les défenseur⸱ses des droits humains en Afghanistan font l’objet de persécutions systématiques, notamment de violences physiques, de détentions arbitraires, de tortures, d’assassinats, de raids et d’attaques contre les membres de leur famille. Les défenseuses des droits humains en particulier celles qui manifestent pacifiquement pour défendre leurs droits et leurs libertés fondamentales, sont régulièrement prises pour cible. Les minorités religieuses et ethniques courent un risque accru de persécution et de violence. Pour les DDH en danger, il n’existe actuellement aucun mécanisme de protection efficace à l’intérieur de l’Afghanistan qui puisse répondre à leurs besoins. Tous les appels à des actions et interventions urgentes auprès des Talibans pour qu’ils respectent les normes fondamentales en matière de droits humains n’ont pas donné de résultats concrets.
Les défenseur⸱ses des droits humains confrontés à la violence et à la persécution n’ont guère d’autre solution que de fuir leur domicile. Nombre d’entre eux ont déménagé plusieurs fois à l’intérieur de l’Afghanistan, ou ont été victimes d’arrestations, de tortures et de violences brutales avant de prendre la décision difficile de quitter leur pays et de fuir de l’autre côté de la frontière. Les DDH afghans en danger n’ont que peu d’options et continuent de subir des menaces, des violences et surtout la crainte d’un retour forcé, même lorsqu’ils quittent l’Afghanistan. La réponse internationale en matière de protection, de soutien et de services dans les pays d’accueil est totalement inadéquate. Les possibilités de réinstallation permanente des DDH afghans en danger, qui sont bloqués indéfiniment sans solution pour eux-mêmes et leur famille, sont également limitées.
L’annonce faite par le Pakistan le 3 octobre 2023, selon laquelle tous les « immigrants illégaux » doivent quitter le pays avant le 1er novembre 2023 pour éviter les arrestations et expulsions massives, aura des conséquences dévastatrices. L’annonce du gouvernement précise que « s’ils (les demandeurs d’asile non enregistrés) ne partent pas […] alors tous les organismes chargés de faire appliquer la loi dans les provinces ou le gouvernement fédéral seront utilisés pour les expulser ».
Cette politique constitue une violation directe des obligations internationales du Pakistan et expose un grand nombre de personnes, dont des défenseur⸱ses des droits humains, à de graves risques. Les preuves documentées par Front Line Defenders témoignent des menaces et des violences subies par les défenseur·ses en Afghanistan et du risque immédiat pour leur vie en cas de retour forcé.
Front Line Defenders appelle les autorités pakistanaises à protéger les défenseur⸱ses des droits humains afghans en danger qui ont trouvé refuge pour échapper à la persécution. Il s’agit notamment de protéger les DDH et leur famille contre un retour forcé en Afghanistan lorsqu’il existe un risque crédible de persécution et d’atteinte à leurs droits. Reconnaissant le rôle déjà joué par les pays voisins, nous appelons la communauté internationale à réagir en prenant des mesures adéquates pour soutenir celles et ceux qui se trouvent dans les pays de transit, notamment en assurant une réinstallation rapide des DDH en danger, et en garantissant l’accès aux services, au soutien et à la protection dans les pays voisins.