Philippines: Front Line Defenders condamne la demande d'ajout des défenseur-ses des droits humains à une liste des terroristes
Front Line Defenders condamne fermement l'ajout des défenseur-ses des droits humains à une liste du ministère de la justice qui cherche à les taxer de terroristes, car cela les expose au risque d'arrestation ou d'agression. Front Line Defenders pense que les DDH sont pris pour cible à cause de leur travail pacifique et légitime en faveur des droits humains aux Philippines.
Dans une atmosphère où la violence contre les défenseur-ses des droits humains règne, le ministère philippin de la Justice a fait une demande, le 23 février 2018, afin de déclarer le Parti communiste des Philippines (PCP) et la Nouvelle Armée du Peuple (NAP), la branche armée du PCP, comme des organisations terroristes. Cependant, de nombreuses personnes citées dans cette pétition sont des défenseur-ses des droits humains. La demande a été déposée en vertu de la loi 9372 sur la République ou la loi de 2007 sur la sécurité humaine, également appelée loi anti-terrorisme.
La demande fait suite à la décision du président Rodrigo Duterte, de classer le PCP et la NAP parmi les groupes terroristes après l'échec des pourparlers de paix avec le Front National Démocratique des Philippines (FNDP) en décembre dernier. En janvier 2018, il a déclaré qu'il poursuivrait les organisations de gauche, les accusant d'être des fronts communistes. Dans ce contexte, de nombreux défenseur-ses des droits humains légitimes et pacifiques ont été taxés de terroristes, ce qui fait d'eux les cibles de violences et d'acharnement judiciaire en les associant à des "organisations terroristes", et les exposent à un important danger. Un grand nombre de ces défenseur-ses des droits humains travaillent sur les droits des populations autochtones, le droit à la terre et les droits des femmes.
Des défenseur-ses autochtones et d'autres qui défendent les droits des populations indigènes sont cités dans la demande, notamment l'actuelle Rapporteuse spéciale de l'ONU sur les droits des peuples autochtones, Victoria Tauli Corpuz. L'écologiste d'Ilocos, Sherwin De Vera, est également considéré comme membre du PCP, tout comme Elisa Tita Lubi, membre du comité national exécutif de Karapatan et ex coordinatrice régionale par intérim de l'Asia Pacific Forum on Women, Law and Development. Les actuels présidents de nombreuses organisations autochtones sont ciblés, ainsi qu'au moins 10 leaders indigènes dans le Mindanao du nord et du Sud.
Il s'agit de la dernière série d'actes menée par l'administration Duterte visant à faire perdre toute légitimité et à saper le travail des défenseur-ses des droits humains aux Philippines. En août 2017, le président Duterte avait appelé la police à tirer sur les défenseur-ses des droits humains qui "entravent la justice" et car ils participent au trafic de drogue. Il avait également menacé les organisations de défense des droits humains d'enquêter sur elles pour avoir critiqué sa guerre contre la drogue.
Le climat d'impunité qui règne dans le pays, conjugué au fait que l'administration encourage les exécutions extrajudiciaires, a entrainé une grave détérioration de la situation pour les défenseur-ses des droits humains. Dans son Rapport annuel 2017 sur les défenseur-ses des droits humains en danger, Front Line Defenders a enregistré 60 assassinats de DDH aux Philippines en 2017, soit une hausse de près de 100% par rapport à l'année précédente. Les défenseur-ses des droits humains sont régulièrement accusés de crimes violents ou d'être membres de la NAP. L'acharnement judiciaire et la criminalisation des défenseur-ses des droits humains restent communs, les politiciens et les acteurs du secteur privé utilisent le système judiciaire pénal pour réduire au silence ceux qui s'opposent à leurs intérêts.