La vie et l’intégrité de la défenseuse des droits humains autochtone Kenia Hernández sont menacées, son transfert dans une autre prison et sa libération anticipée sont des questions urgentes
La défenseuse des droits humains Kenia Hernández est emprisonnée dans la prison de haute sécurité de Centro Femenil de Alta Seguridad No. 16, dans l’État de Morelos depuis 20 mois ; elle est soumise à un régime carcéral restrictif, inhumain et disproportionné en raison de sa criminalisation en tant que défenseuse des droits humains, ce qui porte atteinte à ses droits fondamentaux et à ceux des membres de sa famille ; cela met en danger sa vie et son intégrité physique, psychologique et émotionnelle.
Kenia dénonce les conditions inhumaines auxquelles elle et les autres femmes privées de liberté font face dans cette prison, où trois détenues sont décédées récemment de suicide présumé et deux autres sont mortes par manque d’assistance médicale ; les incidents de violence sont un phénomène constant et, à plusieurs reprises, les autorités elles-mêmes sont à l’origine de ces violences.
Les conditions liées à la privation de liberté que Kenia Hernández dénonce sont entre autres les difficultés d’accès aux consultations médicales (y compris gynécologiques, bien qu’il s’agisse d’un centre de détention pour femmes), ainsi que les restrictions d’accès à l’eau potable. En outre, la défenseuse est soumise à un profond isolement, l’éloignement de ses enfants les empêche de lui rendre visite et ils ne peuvent la voir que tous les six mois, tandis que la communication par téléphone est limitée à 10 minutes tous les 8 jours. Il y a aussi un contrôle de sa correspondance, ce qui signifie qu’elle n’a pas été en mesure de recevoir des fournitures ou même des courriers des autorités judiciaires. Ses rendez-vous avec ses avocats et les visites des organisations de droits humains sont restreints.
Kenia Hernández est une avocate, féministe et défenseuse autochtone Amuzga ; elle a participé à différentes luttes et mouvements sociaux dans l’État de Guerrero. Elle est membre du Mouvement pour la liberté des prisonniers politiques, leader du Collectif libertaire Zapata Vive et officier de la police communautaire de la Coordination régionale des autorités communautaires (CRAC). Depuis 2020, elle est poursuivie pour avoir prétendument commis des « attaques en bandes organisées sur les routes » et des « vols armés avec violence », au détriment de Caminos y Puentes Federales (CAPUFE) et Autovías Concesionaria Mexiquenses ; ces accusations sont liées à son exercice légitime du droit de manifestation et à défendre les droits humains.
Dans le processus de criminalisation, sept affaires criminelles ont été ouvertes contre elle, cinq affaires fédérales et deux affaires de droit commun dans l’État de Mexico, et à ce jour, elle a été condamnée dans deux des affaires, à 11 ans et 3 mois, et 9 ans et 2 mois de prison, respectivement. Depuis qu’elle est emprisonnée, Kenia Hernandez a entrepris deux grèves de la faim, chacune d’une durée de deux mois, pour dénoncer l’acharnement judiciaire dont elle fait l’objet ainsi que les conditions inhumaines de son emprisonnement qui aggravent sa vulnérabilité et les risques.
Kenia Hernández ne devrait pas être emprisonnée, car l’exercice du droit de manifester et de défendre les droits humains n’est pas un crime ; mais même sur la base des crimes dont elle est accusée, elle ne devrait pas être dans une prison de sécurité maximale, où sa vie et son intégrité sont en danger. La garder en prison dans ces circonstances ne peut être interprétée que comme un acte arbitraire de cruauté contre elle et contre la défense des droits humains.
Pour toutes ces raisons, le National Network of Women Human Rights Defenders in Mexico, IM-Defensoras, CIVICUS - World Alliance for Citizen Participation, Front Line Defenders et l’Organisation mondiale contre la torture demandent aux autorités compétentes de transférer immédiatement Kenia Hernández dans une autre prison et de la libérer dès que possible. Nous tenons également l’État mexicain, à tous les niveaux, responsable de la vie et de l’intégrité de Kenia Hernandez et de toute violation dont elle serait victime.