Le défenseur des droits humains Mehmet Raci Bilici injustement inculpé
Dublin, Londres, Paris-Genève, 23 mars 2020 - La répression des défenseurs des droits humains se poursuit en Turquie où un membre du conseil d'administration de l'Human Rights Association (IHD) a été reconnu coupable et condamné à plus de six ans de prison pour ses activités légitimes en faveur des droits humains. L'Observatoire (FIDH-OMCT) ainsi que Front Line Defenders et Amnesty International déplorent cette nouvelle condamnation qui, une fois de plus, reflète le contexte difficile dans lequel les défenseur-ses des droits humains opèrent en Turquie.
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Le 12 mars 2020, Mehmet Raci Bilici, membre du conseil d'administration national de l'Association des droits de l'homme (IHD) et ancien président de la section de Diyarbakır de l'organisation, a été condamné par le tribunal pénal de Diyarbakır n°5 à six ans et trois mois d'emprisonnement pour "appartenance" à une organisation terroriste" (article 314/2 du code pénal turc). La Cour a prononcé une interdiction de voyager à l'étranger contre Mehmet Raci Bilici, qui n'est pas détenu en attendant son appel. Cette condamnation est basée sur son travail légitime en faveur des droits humains entre 2011 et 2014 pour le compte d'IHD en tant que membre du conseil d'administration et ancien président de la branche de Diyarbakır d'IHD. Au moment de la rédaction de cet article, les raisons du jugement n’avaient pas encore été rendues. Le verdict est susceptible d'appel - s'il est confirmé, Mehmet Raci Bilici ne pourra pas exercer en tant qu'avocat, conformément à la loi turque sur les avocats.
Dans l'acte d'accusation, le Procureur avait demandé la condamnation de Mehmet Raci Bilici sur la base d'écoutes téléphoniques et de la surveillance audio des activités auxquelles il avait participé et de certains de ses messages sur les réseaux sociaux en 2015 et 2016. Les activités qui ont fait l'objet de surveillance étaient ses missions pour surveiller les violations des droits humains, sa participation à des réunions d'organisations de défense des droits humains et du Democratic Society Congress, organisation de tutelle axée sur les droits et la politique kurdes. Ses messages postés sur les réseaux sociaux inclus dans l'acte d'accusation ne constituent pas des preuves d'actes criminels, et encore moins de liens avec le terrorisme.
Mehmet Raci Bilici avait déjà été arrêté le 15 mars 2017 avant d'être libéré sous caution et placé sous contrôle judiciaire - interdiction de voyager et présentation au poste de police une fois par semaine - le 21 mars 2017 dans le cadre de la même affaire1. Le contrôle judiciaire avait été levé au printemps 2018.
L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits humains, Amnesty International et Front Line Defenders sont profondément préoccupés par la condamnation de Mehmet Raci Bilici pour "appartenance à une organisation terroriste" sur la base de ses activités de défenseur des droits humains. Ce verdict injuste équivaut à du harcèlement judiciaire ; c'est une tentative pour punir et faire taire Mehmet Raci Bilici afin de l'empêcher, lui et d'autres, de mener ses activités légitimes en faveur des droits humains.
Nous appelons les autorités turques à cesser immédiatement et sans condition toute forme de harcèlement, y compris par le biais de poursuites injustifiées, contre Mehmet Raci Bilici et tous les défenseur-ses des droits humains en Turquie. Nous espérons que la condamnation injuste de Mehmet Raci Bilici sera annulée par la cour d’appel et qu’il sera libre de poursuivre son travail en faveur des droits humains sans nouvel acte de harcèlement à son encontre. Nous continueront à suivre l'affaire de Raci Bilici pendant les différentes phases de l'appel.
1 Voir l'appel urgent de l'Observatoire TUR 001 / 0317 / OBS 026.1 du 24 mars 2017.