Les autorités biélorusses devraient libérer immédiatement et sans condition la défenseuse des droits humains Nasta Loika
Le 20 juin 2023, le tribunal municipal de Minsk a condamné la défenseuse des droits humains Anastasia (Nasta) Loika à sept ans de prison. Le procès s’est tenu à huis clos et on ignore les détails de l’audience. La juge Alyona Shilko a déclaré Nasta Loika coupable d'« incitation à l'inimitié ou à la discorde raciale, nationale, religieuse ou sociale » en vertu de l’article 130, section 3 du Code pénal biélorusse. Cette accusation était basée sur la contribution de Nasta Loika à un rapport de 2018 au sujet des violations des droits humains par les forces de l'ordre dans le cadre de la persécution par l'État de la communauté anarchiste en Biélorussie. Le processus judiciaire s’est déroulé dans des conditions hâtives ; le verdict a été prononcée lors de la troisième audience du procès, tenu au cours d’une période de huit jours.
Les 15 organisations internationales et biélorusses de défense des droits humains soussignées demandent la libération immédiate et inconditionnelle de Nasta Loika.
Nasta Loika est une éminente défenseuse biélorusse des droits humains qui travaille dans le domaine de l'éducation au sujet de ces droits. Elle a également analysé les lois répressives « anti-extrémistes », et plaidé pour la protection des droits des migrants et des apatrides en Biélorussie. Durant l'été 2021, les autorités biélorusses ont fermé Human Constanta, l'organisation où elle travaillait auparavant, dans le cadre d'une attaque orchestrée contre la société civile du pays. Human Constanta promouvait les intérêts publics et les actions conjointes en réponse aux défis en matière de droits humains en Biélorussie. En 2022, l’association Barys Zvozskau Barys Zvozskau Belarusian Human Rights House (BHRH) a nommé Nasta Loika défenseuse des droits humains de l'année.
Nasta Loika a été arrêtée le 28 octobre 2022, et est détenue arbitrairement depuis cette date. Le 31 octobre 2022, le tribunal de district de Pieršamajski à Minsk l'a condamnée à 15 jours d'arrestation administrative sur la base de fausses accusations de « hooliganisme mineur », en vertu de l'article 19.1 du Code des infractions administratives. Les autorités ont ensuite prolongé sa détention à trois reprises.
Pendant les 58 jours d'arrestation administrative, les autorités ont torturé Nasta Loika et l'ont traitée de manière inhumaine ; elles lui ont refusé le droit de recevoir des médicaments et des vêtements chauds, et d'avoir accès à une aide juridique. La maison de sa mère a été perquisitionnée en novembre 2022.
Le 24 décembre 2022, les forces de l'ordre biélorusses ont transféré Nasta Loika au Centre de détention provisoire n°1 à Minsk. Dans un premier temps, le procureur l'a accusée d'avoir enfreint les articles 130, section 3, du Code pénal (« incitation à l'inimitié ou à la discorde raciale, nationale, religieuse ou d’autre type »), ainsi que l'article 342, section 1 (« organisation d'actions de groupe portant gravement atteinte à l'ordre public »). Le procureur a fini par abandonner la deuxième accusation.
Les autorités biélorusses ont également pris pour cible des avocates spécialisées dans le domaine des droits humains, qui assuraient la défense de Nasta Loika. En novembre 2022, Tatsiana Lishankova a été arrêtée ; sa licence d’avocate a par la suite été annulée. En mars 2023, la Commission de qualification du ministère de la Justice a refusé de reconnaître l’aptitude d'une autre avocate de la défense, Inessa Olenskaya, ce qui entraînera sa radiation du barreau.
Les organisations soussignées considèrent que ce ciblage des avocates des droits humains travaillant pour la défense de Nasta Loika est une violation flagrante de son droit à la défense, ainsi qu'une violation du droit de ces avocates à exercer leur profession.
La police a arrêté Nasta Loika pour la première fois le 6 septembre 2022, près du tribunal municipal de Minsk, lorsqu'elle y est venue pour montrer son soutien à deux autres défenseur·ses des droits humains : Maria (Marfa) Rabkova, qui a été condamnée ce jour-là à 15 ans de prison ; et Andreï Chapiuk, condamné a six ans de prison. Nasta Loika a été provisoirement libérée le 5 octobre 2022, avant d’être à nouveau détenue le 28 octobre.
Les organisations soussignées condamnent l'arrestation et le verdict contre Nasta Loika. Nous estimons que les autorités biélorusses la ciblent pour son travail pacifique et légitime en faveur des droits humains. Nous condamnons la torture physique et psychologique que Nasta Loika a subie pendant son arrestation administrative et sa détention provisoire. Sa condamnation reflète les attaques systémiques aggravées contre les défenseur·ses des droits humains et la société civile biélorusses, par les autorités de ce pays. Nous appelons à la libération immédiate et inconditionnelle de la défenseuse des droits humains Nasta Loika.
Organisations signataires :
ARTICLE 19 EuropeNetherlands Helsinki CommitteeThe Barys Zvozskau Belarusian Human Rights House
Belarusian Helsinki Committee
Belarusian Association of Journalists
La Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), dans le cadre de l'Observatoire pour la protection des défenseur⸱ses des droits humains
Front Line Defenders
Human Constanta
Human Rights Centre Viasna
Human Rights Watch
Lawtrend
Legal Initiative (Belarus)
Office for the Rights of Persons with Disabilities
REDRESS
Organisation mondiale contre la torture (OMCT), dans le cadre de l'Observatoire pour la protection des défenseur⸱ses des droits humains