Marino Cordoba Berrio
Marino Cordoba Berrio est un leader communautaire qui lutte pour les droits des Afro-Colombiens, ainsi que pour ceux d'autres groupes marginalisés. Il est originaire de Riosucio, une région située au nord-ouest de la Colombie qui abrite une jungle caractérisée par une riche biodiversité. La plupart de la région est depuis longtemps contrôlée par des groupes paramilitaires, soutenus par de puissants acteurs économiques. Le droit à la terre des communautés locales est souvent bafoué, notamment à cause de l’exploitation forestière et minière.
Marino Cordoba Berrio a, dès le début des années 90, œuvré à faire reconnaître le droit ancestral à la terre de ces communautés. En tant que syndicaliste, il a également travaillé avec le syndicat des travailleurs des plantations de bananes pour obtenir de meilleurs salaires, de meilleurs services de santé et le respect du travail syndical.
Marino est l'un des principaux leaders communautaires à l'origine des changements constitutionnels de 1991, qui ont mené à la reconnaissance de la minorité Afro-Colombienne. Ces changements ont permis l'adoption de la loi 70, en 1993, qui leur donne des droits sur leurs terres, leurs ressources naturelles et leur environnement. Cette loi consacre aussi leur participation à la vie politique du pays, en leur ouvrant les portes du Congrès colombien.
Le 20 décembre 1996, sept jours après que le gouvernement a reconnu le droit à la terre de la communauté à laquelle appartient, Les communautés Afro-Colombiennes ont commencé à être expulsées de leurs terres lors de l’« Opération Genesis », menée conjointement par l’armée et des groupes paramilitaires.
Après s'être caché pendant des semaines dans la jungle, Marino Cordoba Berrio trouve refuge à Bogota. En 1999, il fonde l'AFRODES (Association nationale des Afro-Colombiens déplacés) afin d’aider les personnes déplacées, porter plainte au nom des victimes et leur permettre de rentrer chez eux. La visibilité donnée aux revendications des Afro-Colombiens finiront par avoir raison de sa sécurité : en 2002, il est blessé par balle à la jambe au cours d’une agression.
Après d'autres attaques, avec l’aide de membres du Congrès américain, il obtient l’asile aux États-Unis. Il y poursuit son travail en faveur des communautés Afro-colombiennes, en créant un réseau de soutien qui compte des politiciens, des universitaires, des organisations de défense des droits humains et d’autres acteurs de la société civile. Il cherche un soutien politique pour promouvoir promouvoir la justice et obtenir que leurs terres et entreprises accaparées par les groupes paramilitaires leur soient rendues. Il se mobilise également pour bloquer le financement de projets d'huile de palme liés aux paramilitaires et obtenir du Congrès de lier assistance militaire à la Colombie et respect des droits humains.
En 2012, malgré les risques pour sa sécurité, Marino Cordoba Berrio a décidé de retourner vivre en Colombie, laissant sa famille aux États-Unis. En tant que président de l’AFRODES, il continue à défendre les intérêts des Afro-Colombiens. Sa détermination ont conduit à l’inclusion d’un chapitre « ethnique » dans l’accord de paix signé entre le gouvernement colombien et les FARC-EP, en novembre 2016.
Il y est explicitement reconnu que les groupes ethniques ont contribué à l'édification d'une paix, d'un progrès et d'un développement économique et social viables et durables dans le pays. Sont également reconnues les souffrances et les injustices dont ils ont été victimes non seulement en raison du conflit armé, mais également du colonialisme, de l'esclavage, de leur marginalisation et de la dépossession de leurs terres et ressources. L’accord acte la prise en compte de leurs spécificités ethniques, culturelles et sociales, ainsi que de leurs besoins, aspirations, intérêts et visions du monde.
Les succès obtenus par Marino Cordoba Berrio sont synonymes de danger accru pour lui, sa famille, ses collègues et sa communauté. En 2017, son fils Wilmar est assassiné, tout comme le leader communautaire Bernardo Cuero Bravo et son fils. Au total, plus de 400 leaders sociaux, défenseurs des droits humains et membres d’organisations communautaires ont été tués, depuis la signature de l’accord de paix en Colombie. Marino, lui, ne ne se déplace qu’accompagné de gardes du corps.