Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan agressées physiquement et insultées

Le 29 mai 2021, les défenseuses des droits humains Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan ont été agressées verbalement et physiquement par des hommes inconnus et un policier. L’agression a eu lieu lors d’un événement public organisé par les deux défenseuses à Shymkent. Après l’attaque, un policier a arrêté Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan.

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Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan sont défenseuses des droits humains, militantes LGBTQI+ et co-fondatrices de l’Initiative féministe du Kazakhstan « Feminita ». Zhanar Sekerbayeva est journaliste, poète, chercheuse et docteure en sciences sociales (Université de Tsukuba). Elle plaide aux niveaux local et international, reliant les domaines académique et civique. Gulzada Serzhan est titulaire d’une maîtrise en théorie économique (Russian School of Economics) et est stagiaire à l’Université de Californie à Berkeley.

L’Initiative féministe du Kazakhstan « Feminita » est une organisation de défense des droits humains queer-féministe qui s’emploie à protéger les droits des femmes issues des groupes les plus opprimés au Kazakhstan (lesbiennes, bisexuelles, femmes queer et trans, femmes handicapées, travailleuses du sexe). L’organisation essaie de s’enregistrer en tant qu’entité légale au Kazakhstan depuis décembre 2017.

Le 29 mai 2021, Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan étaient en train de préparer un événement public sur les droits des femmes et l’égalité des genres à Shymkent. Cependant, les défenseuses des droits humains ainsi que 15 participantes n’ont pas été autorisées à se réunir dans la salle de conférence réservée au préalable dans le City Hotel de Shymkent. Elles se sont alors rendues au café de l’hôtel où une trentaine d’inconnus agressifs ont commencé à s’en prendre verbalement à Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan ainsi que d’autres femmes qui participaient à l’événement en les harcelant et en les insultant. Les inconnus ont appelé la police et ont encerclé les défenseuses des droits humains.

Depuis le 23 mai 2021, Zhanar Sekerbayeva reçoit des menaces en ligne, car son numéro de téléphone a été publié sur TikTok et d’autres réseaux sociaux. Elle a reçu plus de 60 appels téléphoniques et 1500 messages sur Whatsapp provenant d’inconnus. La chanteuse populaire kazakhe Altynay Zhorabayeva, et Bagila Baltabaeva, membre de l’Union kazakhe des parents, ont dénoncé publiquement les défenseuses des droits humains et ont demandé à leurs partisans sur les réseaux sociaux de perturber les événements organisés par les défenseuses.

Lorsque le policier, Arman Aripzhanov, est arrivé au café, il a commencé à crier et à insulter Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan et leur a demandé de l’accompagner. Il a arrêté les deux défenseuses des droits des femmes. Le policier et les hommes qui harcelaient les femmes ont brutalement attrapé Zhanar Sekerbayeva et l’ont forcée à monter dans une voiture de police banalisée. L’incident a été documenté et posté sur la page Facebook de Feminita. Le policier ne leur a pas dit pourquoi il les arrêtait. Zhanar Sekerbayeva a des ecchymoses sur les mains à cause de la façon dont elle a été traitée, ce qui a été confirmé par un examen médical. Selon le service de presse du département de police de la ville de Shymkent, le policier « a pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des organisateurs de l’événement ».

Zhanar Sekerbayeva a déclaré à Front Line Defenders que lorsqu’elle a été poussée dans le véhicule, un autre homme inconnu a ouvert la porte d’en face et a essayé de la sortir de la voiture par les cheveux, et qu’un autre homme l’a frappée au visage. L’un de ces hommes a pris le téléphone de Gulzada Serzhan, qu’il a remis au policier. Ignorant cette attaque, le policier a emmené les défenseuses des droits humains au poste de police du district d’Abay à Shymkent. Zhanar Sekerbayeva a été accusée d’avoir « agressé des représentants de l’État » en vertu de l’article 378 du Code pénal de la République du Kazakhstan. Cependant, la police a accepté de ne pas la condamner si elle ne portait pas plainte contre le policier Arman Aripzhanov. Les inconnus qui ont attaqué les défenseuses des droits humains n’ont pas été interpellés.

Au poste de police, Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan ont été interrogées sur les objectifs de leur visite à Shymkent pendant 8 heures sans manger et leurs téléphones ont été confisqués, mais elles ont été autorisées à rencontrer un avocat. Dans la soirée, une centaine de personnes, pour la plupart des hommes, se sont présentées devant le commissariat de police du district d’Abay, défendant les valeurs traditionnelles et exigeant « donnez-nous les lesbiennes et nous aurons un procès ». L’acteur populaire kazakh Kalybaev Galymzhan était également présent et provoquait les gens. La vidéo de cette manifestation a été publiée sur YouTube. Les policiers ont communiqué avec les gens de manière amicale et certains d’entre eux sont même venus au poste de police pour porter plainte contre Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan. Selon l’inspecteur de police, ils ont également eu la possibilité de voir les documents du dossier des défenseuses des droits humains.

Vers minuit le 29 mai 2021, après 8 heures passées au commissariat, les défenseuses des droits humains ont été invitées par la police à quitter Shymkent immédiatement. Les policiers ont interdit à Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan de retourner à Almaty en train et, au lieu de cela, elles ont été escortées pendant huit heures dans une voiture de police par 5 autres policiers qui ont même accompagné les défenseuses des droits humains aux toilettes. Pendant le voyage, les policiers ont filmé les défenseuses sans leur consentement, dans le but de montrer comment la police les avait protégées. Les policiers ont assuré que cela était nécessaire pour assurer la sécurité des défenseuses des droits humains.

Front Line Defenders est profondément préoccupée par les attaques et la détention des défenseuses des droits humains Zhanar Sekerbayeva et Gulzada Serzhan, car elle pense qu’elles sont ciblées uniquement à cause de leur travail pour la promotion et la protection des droits des femmes et des personnes LGBTQI+ au Kazakhstan. Front Line Defenders condamne l’intimidation et les actions ciblées contre les défenseuses des droits humains, qui peuvent avoir un effet paralysant sur la société civile, et qui ne permettent pas la création d’un environnement sûr et propice dans lequel les défenseur-ses des droits humains peuvent mener à bien leur travail au Kazakhstan.