Interdiction de voyager contre Ahmed Ragheb
Le 15 novembre, des officiers du contrôle des passeport de l'aéroport international du Caire ont dit à M. Ahmed Ragheb qu'il n'était pas autorisé à se rendre au Maroc où il devait participer à la 22e conférence des parties (COP 22) de la Conférence de l'ONU sur le changement climatique.
Ahmed Ragheb est un avocat égyptien et fondateur de National Community for Human Rights and Law (NCHRL), une organisation qui œuvre pour la défense des droits humains autour des mouvements populaires en Égypte qui promeuvent les droits humains ey ma justice sociale. En juillet 2012, l'avocat a été nommé par l'ancien président égyptien Mohamed Morsi comme membre d'une mission d'enquête sur les décès lors des manifestations en Égypte qui avaient commencé le 25 janvier 2011.
Entre le 10 et le 15 novembre, la répression contre le mouvement de défense des droits humains égyptien s'est accentuée. Le 15 novembre, des officiers du contrôle des passeport de l'aéroport international du Caire ont dit à M. Ahmed Ragheb qu'il n'était pas autorisé à se rendre au Maroc où il devait participer à la 22e conférence des parties (COP 22) de la Conférence de l'ONU sur le changement climatique. Le 14 novembre, un projet de loi extrêmement restrictif a été présenté par 204 parlementaires égyptiens et adopté en première lecture. Enfin, le 10 novembre, El Nadeem Center for Rehabilitation of Victims of Violence and Torture (Centre El Nadeem pour la réhabilitation des victimes de violence et de torture) a été informé que les autorités égyptiennes avait donné l'ordre à la banque Crédit Agricole de bloquer les comptes de l'organisation jusqu'à ce que son statut soit conforme à la loi 84/2002.
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Le 15 novembre, le contrôle des passeports égyptien a informé Ahmed Ragheb qu'un juge d'instruction a ordonné une interdiction de voyager en mai 2016. L'ordre a été émis sans avertir le défenseur et il ne connait pas les charges portées contre lui. Le défenseur était en route pour Marrakech , au Maroc, pour participer à la COP 22. La décision d'interdire Ahmed Ragheb de voyager est la sixième de la sorte, avec cinq autres interdictions de voyager prononcées dans le cadre d'une affaire de financements étrangers, aussi appelée affaire N°173. Depuis 2011, 37 organisations égyptiennes sont accusées dans des affaires de financements étrangers, et certains leaders et membres de ces organisations de défense des droits humains sont accusés d'avoir "reçu des financements étrangers" et de "travailler sans autorisation légale". Dans le cadre de l'une de ces affaires, un tribunal égyptien a approuvé le 17 septembre 2016 le gel des avoirs de cinq éminents défenseur-ses des droits humains et de trois ONG de premier plan. Toujours dans le cadre de cette affaire, cinq autres défenseur-ses des droits humains ont été interdits de voyager début 2016, dans ce qui apparait comme une vague contre le mouvement de défense des droits humains en Égypte.
L'interdiction de voyager contre Ahmed Ragheb coïncide avec une campagne d'acharnement judiciaire sans précédent contre le mouvement des droits humains. Le 14 novembre, un projet de loi extrêmement restrictif a été présenté par 204 parlementaires égyptiens et adopté en première lecture. Le projet de loi menace les défenseur-ses des droits humains et le personnel des ONG de peines d'un à cinq ans de prison et d'amendes allant de 50 000 à 1 million de livres égyptiennes s'ils facilitent ou participent à des activités organisées par des organisations internationales sans l'autorisation des autorités égyptiennes, ou si ils effectuent des recherches sur le terrain ou des sondages publiques en tant que société civile sans autorisation préalable. Le projet de loi permettrait aussi le contrôle des autorités sur la création des ONG égyptiennes et obligerait aussi les ONG internationales à s'enregistrer auprès des autorités. Le projet de loi donne aussi le pouvoir aux autorités d'imposer le lieu et le siège des opérations de la société civile, et propose d'emprisonner les défenseur-ses des droits humains jusqu'à un an et de les condamner à une amende entre 20 000 et 500 000 livres égyptiennes pour des "crimes" tels que le déménagement du siège de l'organisation dans un lieu autre que le lieu initialement autorisé. Le projet de loi place également une responsabilité individuelle sur les membres du personnel gouvernemental qui autorise le travail des ONG qui contreviennent à la loi susmentionnée.
Dans le cadre de la répression continue contre les organisations de défense des droits humains en Égypte, le 10 novembre, l'El Nadeem Centre a fait l'objet d'une nouvelle vague de mesures restrictives qui interdisent à son personnel d'accéder au compte bancaire de l'organisation pour "non respect de la loi 84/2002". La loi 84/2002 sur les organisations non gouvernementales (associations et institutions non gouvernementales) régule la création et le fonctionnement des ONG, et donne à la branche exécutive du gouvernement égyptien plusieurs moyens pour exercer un contrôle sur le travail des ONG, notamment en restreignant l'accès aux financements étrangers et leur capacité à se joindre à des associations internationales. Elle donne aussi au gouvernement le pouvoir de les dissoudre. Ce n'est pas la première fois que El Nadeem est la cible de campagnes contre la société civile et les défenseur-ses des droits humains orchestrées par les autorités égyptiennes. Le 17 février 2016, des responsables du district d'Azbakeyya ont exécuté un ordre administratif (35/2016) pour fermer l'organisation non gouvernementale en se basant sur une décision du ministère de la Santé du 8 février 2016, et approuvée par les autorités du district du Caire le 15 février 2016, affirmant qu'El Nadeem avait enfreint "les conditions de sa licence".
Front Line Defenders condamne la criminalisation de la société civile en Égypte, notamment par le biais des interdictions de voyager, le blocage des comptes bancaires de l'organisation et le gel des avoirs. Front Line Defenders appelle à la fin immédiate des persécutions des défenseur-ses des droits humains, rappelle leur rôle essentiel dans le développement d'une société civile juste et égalitaire; Front Line Defenders est également très préoccupée par le nouveau projet de loi sur les ONG actuellement débattu au Parlement.
Front Line Defenders exhorte les autorités égyptiennes à:
1. Annuler immédiatement et sans condition l'interdiction de voyager prononcée contre Ahmed Raghed et tous les autres défenseur-ses des droits humains en Égypte, car Front Line Defenders pense qu'ils sont pris pour cible uniquement à cause de leur travail légitime et pacifique en faveur des droits humains;
2. Ne pas adopter le projet de loi sur les ONG présenté le 14 novembre devant le Parlement égyptien, car il restreindrait sévèrement le travail des organisations de défense des droits humains en Égypte;
3. Annuler l'ordre de bloquer les comptes bancaires d'El Nadeem Centre for Rehabilitation of Victims of Violence and Torture, car Front Line Defenders pense que l'organisation est prise pour cible uniquement à cause de ses activités légitimes en faveur des droits humains;
4. Mettre un terme à l'actuelle campagne contre El Nadeem et les autres organisations de défense des droits humains en Égypte, et abandonner toutes les charges et mesures à leur encontre, notamment le blocage de leur compte bancaire et les ordres administratifs.
5. Cesser immédiatement de cibler toutes les organisations de défense des droits humains en Égypte et garantir qu'en toutes circonstances ils-elles puissent mener à bien leurs activités légitimes en faveur des droits humains, sans craindre ni restrictions ni représailles, y compris l'acharnement judiciaire.