Marvin Wilcox et Ligia Arreaga détenus et libérés dans le cadre d'une affaire d'expropriation de terres
Le 15 janvier 2019, le défenseur des droits humains Marvin Wilcox a été arrêté à Barú, dans la province de Chiriquí, avec quatre autres maraichers qui tentaient de vendre leurs fruits et légumes. Deux semaines auparavant, le 2 janvier, la défenseuse Ligia Arreaga a été arrêtée alors qu'elle tentait d'enquêter sur le traitement des maraichers de Barú.
Ligia Arreaga est défenseuse des droits humains, coordinatrice de l'Alianza por un Mejor Darién (AMEDAR) et journaliste d'investigation freelance qui se concentre sur les questions environnementales et d'expropriation des terres.
Le 15 janvier 2019, le défenseur des droits humains Marvin Wilcox a été arrêté à Barú, dans la province de Chiriquí, avec quatre autres maraichers qui tentaient de vendre leurs fruits et légumes. Les producteurs de Barú ne sont pas autorisés à vendre leurs produits depuis plusieurs mois, en raison de la mise en place d'un projet gouvernemental qui cherche à exproprier plus de 400 maraichers de leurs terres pour permettre la culture de bananes par la multinationale Del Monte Fresh. Deux semaines auparavant, le 2 janvier, la défenseuse Ligia Arreaga a été arrêtée alors qu'elle tentait d'enquêter sur le traitement des maraichers de Barú.
Marvin Wilcox est défenseur des droits humains et leader des maraichers de Barú affectés par le projet gouvernemental appelé loi contrat 36-17. Il est également membre du Comité en Defensa de la Tierra de Barú et de “Unidos por el Agro”. Le Comité en Defensa de la Tierra de Barú est un groupe de producteurs ruraux qui cherchent à protéger leurs terres contre les concessions accordées aux entreprises multinationales. Ligia Arreaga est défenseuse des droits humains, coordinatrice de l'Alianza por un Mejor Darién (AMEDAR) et journaliste d'investigation freelance qui se concentre sur les questions environnementales et d'expropriation des terres.
Le 15 janvier 2019 vers 13h, Marvin Wilcox a été arrêté avec quatre autres maraichers de la municipalité de Barú, province de Chiriquí, pour avoir tenté de vendre leurs récoltes de bananes, manioc, papayes et avocats sans avoir eu l'autorisation préalable des autorités locales. La police a saisi les cinq camions qu'ils utilisaient, ainsi que tous leurs produits, qui depuis ont fini par pourrir. Ces produits attendent toujours une inspection, qui est prévue pour le 30 janvier 2019. Ce groupe a été spécifiquement pris pour cible à cause du travail médiatisé de Marvin Wilcox et de son rôle de leader du Comité en Defensa de la Tierra de Barú.
Les cinq producteurs ont été libérés dans la soirée du 15 janvier, après sept heures de détention. Une autre audience est fixée au 2 février 2019. Aucune information n'a été donnée concernant l'audience.
Marvin Wilcox fait aussi l'objet d'une campagne de diffamation ; le défenseur a indiqué que les médias l'accusent de vouloir tirer profit des maraicher pour obtenir de l'argent. Un inconnu lui a également offert un pot de vin en échange de la suspension de ses activités.
Le 2 janvier 2019, Ligia Arreaga a été arrêtée pour avoir enquêté sur un groupe de maraichers qui cherchait à obtenir l'accord d'un médiateur nommé par le gouvernement pour vendre leurs produits. La médiatrice, Ulzana Valdés, également appelée “Juez de Paz" (juge de paix), est basée dans une sous-division de la police de Finca Blanco. Le 2 janvier 2019, Ligia Arreaga a vu des maraichers avec des camions pleins de produits agricoles dans la sous-division de la police. Ils attendaient l'accord de la médiatrice, qui intervient aux côtés du maire et de la police. Ligia Arreaga a indiqué que, lorsqu'elle a demandé une interview à la médiatrice, Ulzana Valdés a tenté de lui prendre sa caméra. La médiatrice a alors ordonné la mise en détention de Ligia Arreaga pour "violations de la vie privée".
Ligia Arreaga a été placée en détention et conduite au poste de police de Puerto Armuelles. On ne lui a remit aucun papier concernant sa détention, et on ne l'a pas informée de l'endroit où elle allait être conduite. Une fois au poste, elle a été fouillée deux fois, dont une fouille sans les vêtements. Elle a été menottée à une barre en métal placée au mur, à côté d'un banc en ciment, pendant 26 heures et pendant ce temps on ne lui a pas donné de nourriture. Malgré la décision du premier juge municipal de Barú, qui a accordé un habeas corpus en sa faveur le 2 janvier, Ligia Arreaga n'a été libérée qu'à 17h le 3 janvier. Elle a reçu une amende de 300$US pour non présentation de ses papiers d'identité, ces derniers ayant été égarés lors de sa détention.
Depuis octobre 2018, plus de 400 maraichers de Barú sont victimes de tentatives d'expropriation de leurs terres par le gouvernement, suite à l'adoption de la Loi-contrat 36-17, soutenue par l'Assemblée législative du Panama. La loi-contrat concède l'usage de 6000 hectares de terres pour 20 ans destinés à la production intensive de bananes par l'entreprise privée Banana Piña, une filiale de la multinationale Del Monte Fresh. La loi-contrat possède une clause qui taxe les producteurs, qui occupent les terres depuis plus de 20 ans, d'envahisseurs.
Plus de 800 maraichers ont pris possession des terres de Barú depuis qu'elles ont été abandonnées par la United Fruit Company en 1998. Plusieurs producteurs tentent d'obtenir légalement des titres de propriété pour leurs terres. À ce jour, un seul a réussi.
Les autorités panaméennes font pression sur les producteurs afin qu'ils acceptent une somme de 2200$ US en échange de leurs terres. Depuis le 26 décembre 2018, ceux qui n'ont pas accepté l'offre font l'objet de plusieurs barrages policiers sur la route, et ceux qui restent au sein du périmètre n'ont pas le droit de transporter leurs produits à cause de leur statut d'"envahisseur".
En entravant la capacité des maraichers à vendre leurs produits, le gouvernement empêche les communautés de gagner leur vie. Ces actions sont principalement menées par le maire de Barú, la médiatrice et la police, dans le but de contraindre les producteurs à quitter leurs terres. Les autorités exercent un contrôle de facto du transport des produits agricoles, dont la compétence relève de jure du ministère du développement agricole.
La pression du gouvernement s'est accentuée depuis l'an dernier. Le 12 novembre 2018, la médiatrice a ordonné l'expulsion de plusieurs producteurs de leurs terres pour "intrusion sur une propriété privée". La décision a été confirmée par ordre d'un tribunal. Bien que l'ordre ait été suspendu par une cour d'appel, les maraichers ont été expulsés de force le 21 novembre 2018. Plusieurs maisons et des milliers de produits, dont ceux de Marvin Wilcox, ont été détruits. Le bureau du défenseur public mène une enquête administrative sur les actes de la médiatrice, en particulier au vu des allégations d'abus de pouvoir.
Front Line Defenders est vivement préoccupée par l'acharnement judiciaire et la détention de défenseur-ses des droits humains et des maraichers de la région de Barú. Front Line Defenders est également très préoccupée par l'absence de procédures requises relatives à l'expropriation des maraichers ainsi que par les abus d'autorité et le harcèlement pour faire appliquer la loi-contrat 36-17. Enfin, Front Line Defenders condamne la campagne de diffamation contre les maraichers qui s'opposent au projet, car l'organisation craint qu'une telle stigmatisation conduise à une nouvelle hausse de la violence à leur encontre.