Déclaration conjointe sur la détérioration de la santé de G. N. Saibaba à la prison centrale de Nagpur
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Sept organisations de défense des droits humains ont fait part de leurs préoccupations au sujet de la détérioration de la santé de Gokarakonda Naga Saibaba, professeur à l’Université de Delhi, dans la prison centrale de Nagpur, dans l’État du Maharashtra, et ont appelé les autorités indiennes à lui fournir de toute urgence un accès aux soins de santé.
G.N. Saibaba a d’abord été arrêté en 2014 et accusé de liens avec des organisations maoïstes interdites. En mars 2017, il a été reconnu coupable en vertu de la Loi sur la prévention des activités illégales (UAPA) et condamné à la prison à vie. Un appel pour la suspension de sa peine est en instance devant le Banc de Nagpur de la Haute Cour de Bombay. Militant, érudit et professeur à l’Université de Delhi, il est un militant bien connu pour les droits des communautés traditionnellement opprimées, en particulier les communautés Dalits et autochtones, en Inde. Il a dénoncé la violence et la discrimination à laquelle ces communautés sont confrontées, en particulier dans le centre de l’Inde riche en minéraux. Il a mené une vaste campagne contre les graves violations des droits humains perpétrées par les miliciens de Salwa Judum, soutenus par l’État, et par les forces de sécurité gouvernementales, notamment les meurtres, la torture et les déplacements forcés perpétrés dans l’État du Chhattisgarh depuis mi-2005.
Saibaba a un handicap dû à la polio et d’autres problèmes de santé graves, y compris un problème cardiaque, un kyste du cerveau, de l’hypertension et des difficultés respiratoires. Des membres de sa famille ont déclaré qu’en prison, où il est détenu à l’isolement dans une cellule sans fenêtre, connue sous le nom de cellule anda ou ovoïde, sa santé se détériore gravement et il souffre de saignements rectaux et de difficultés respiratoires, exacerbés par la chaleur extrême de l’été dans des conditions exiguës. Le personnel de la prison n’a pas pris les mesures d’adaptation nécessaires compte tenu de ses handicaps.
Saibaba est sous surveillance vidéo constante (CCTV) dans sa cellule, ce qui porte atteinte à son droit à la vie privée. Les tribunaux rejettent ses appels répétés de libération conditionnelle et les demandes de libération pour raisons médicales. Les tribunaux refusent également ses demandes pour sortir de l’isolement ou de le transférer à la prison d’Hyderabad, afin qu’il soit proche de sa famille.
Le refus de soins adéquats et spécialisés constitue une grave violation des droits humains. Son état continue de s’aggraver en prison en raison d’un manque de traitement. En 2018, son bras gauche a été paralysé en raison de lésions nerveuses et d’absence de traitement en temps opportun. L’inflammation s’est depuis propagée à son bras droit et il n’est plus en mesure d’utiliser ses mains pour écrire ou pour des gestes quotidiens. Saibaba a besoin de l’aide de deux personnes pour toutes les fonctions, y compris pour s’asseoir, manger, boire de l’eau et utiliser les toilettes, en pleine vue des caméras de vidéosurveillance. Il a des douleurs constantes dans le dos, les hanches et des douleurs lancinantes dans le bras gauche. Sa famille a dit qu’il n’avait reçu aucun traitement pour le soulager ni les traitements dont il a besoin depuis qu’il est en prison. Il a contracté le COVID-19 deux fois en prison, en janvier 2021 et en février 2022, ce qui a entraîné une nouvelle détérioration de sa santé.
Le traitement de Saibaba en prison est une violation de ses droits à la vie, à la santé, à la vie privée et à la dignité et viole les obligations de l’Inde en vertu du droit international, en particulier de l’article 10 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’Homme a déjà demandé sa libération pour raisons médicales, appelant « les autorités indiennes à veiller immédiatement à ce que le Dr Saibaba ait un accès continu et sans restriction aux soins de santé, y compris un traitement et une réadaptation adéquats. » 1 Les Normes minimales des Nations Unies pour le traitement des prisonniers reconnaissent les droits des prisonniers et notamment leur droit à la santé. L’article 24 déclare : « L’État a la responsabilité d’assurer des soins de santé aux détenus. Les détenus devraient recevoir des soins de même qualité que ceux disponibles dans la société et avoir accès aux services nécessaires sans frais et sans discrimination fondée sur leur statut juridique. » De plus, le refus de mesures d’adaptation raisonnables pour les personnes handicapées en détention est non seulement discriminatoire, mais peut entraîner des conditions de détention qui équivalent à de la torture ou d’autres mauvais traitements.
Nous continuons de surveiller la santé de Saibaba et demandons une intervention immédiate dans cette affaire. L’an dernier, nous avons lancé des appels semblables concernant la santé de Stan Swamy, un défenseur des droits humains âgé de 84 ans qui est décédé en détention le 5 juillet 2021. Nous croyons que sa mort et ses souffrances auraient pu être évitées grâce à une intervention rapide et humaine. Les dommages à la santé de Saibaba pourraient devenir irréversibles, voire fatals, si ses conditions de détention restent inchangées et s’il continue de se voir refuser des soins de santé adéquats en temps opportun.
Nous exhortons les autorités indiennes compétentes à :
Le libérer pour des raisons humanitaires.
En attendant sa libération, fournir à G.N. Saibaba un accès immédiat et continu à des soins de santé adaptés, le sortir de l’isolement et prendre des mesures d’adaptation raisonnables relatives à son handicap.
S’assurer que G.N. Saibaba soit protégé contre toute forme de torture et autres mauvais traitements pendant sa détention, et qu’il soit autorisé, sans délai, à voir régulièrement sa famille et son avocat.
Que la Commission nationale des droits humains en Inde intervienne pour garantir l’accès de G.N Saibaba à un traitement adéquat, conformément aux appels présentés par sa famille et la société civile.
Modifier la Loi sur les activités illégales (prévention), après une véritable consultation significative avec les organisations de la société civile indépendantes et les défenseur⸱ses des droits humains, afin de la rendre conforme aux obligations de l’Inde en vertu du droit international relatif aux droits humains.
Veiller à ce que les défenseur⸱ses des droits humains en Inde puissent mener à bien leur travail en faveur des droits humains sans crainte de représailles, y compris le recours abusif au système de justice pénale.
Pour plus d'informations, contactez:
Front Line Defenders: Claire Ivers, Responsable du plaidoyer, civers@frontlinedefenders.org
CIVICUS: Josef Benedict,Chercheur Asie-Pacifique, josef.benedict@civicus.org
Amnesty international: press@amnesty.org
OMCT - lolanda Jaquemet, directrice de communication: ij@omct.org
Signé:
Amnesty International
Asian Forum for Human Rights and Development (FORUM-ASIA)
CIVICUS: World Alliance for Citizen Participation
Front Line Defenders
Human Rights Watch
La Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), dans le cadre de l'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits humains
L'Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT), dans le cadre de l'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits humains
1 https://www.ohchr.org/en/press-releases/2018/06/un-experts-urge-india-re...