Déclaration commune de la société civile s’opposant à la participation de représentants de la junte du Myanmar au dialogue UE-ASEAN sur les droits de l’homme
Tous les groupes de la société civile participant à l’actuel Forum de la société civile UE-ASEAN, y compris les coprésidents de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) et de FORUM-Asia, et celles qui ont décidé de se retirer du processus, dont Human Rights Watch (HRW), Front Line Defenders (FLD) et Protection International (PI), souhaitent exprimer leur consternation face à l’invitation de représentants de la junte du Myanmar au dialogue UE-ASEAN sur les droits de l’homme le 3 octobre. Nous demandons instamment à l’UE et à l’ASEAN de reconsidérer cette décision et de désinviter tout représentant de la junte du Myanmar.
Nous regrettons vivement l’invitation de représentants de la junte, car cela est en contradiction avec l’approche adoptée par l’UE et l’ASEAN en réaction au coup d’État militaire de février 2021 au Myanmar, qui a annulé les élections générales de novembre 2020, et à la répression brutale exercée par la junte contre les militants pro-démocratie et les minorités ethniques, ainsi que contre les groupes de la société civile, les défenseur⸱ses des droits humains, les syndicats, les journalistes et les opposants politiques. Nous rejetons avec la plus grande fermeté tout effort qui pourrait être perçu comme légitimant la junte.
L’Union européenne a adopté une approche de principe face à la crise des droits humains au Myanmar : elle a décidé de ne pas reconnaître la junte, a adopté des sanctions ciblées contre les personnes et les entités responsables des horribles abus commis par la junte et a joué un rôle de premier plan dans la mise en place du mécanisme d’enquête indépendant des Nations unies sur le Myanmar. L’ASEAN a exclu les représentants de la junte des sommets et des réunions ministérielles, et le président indonésien Joko Widodo, qui préside actuellement l’ASEAN, a proposé que les représentants de la junte du Myanmar soient exclus d’autres réunions de l’ASEAN.
La décision de dernière minute d’inviter des représentants de la junte au dialogue sur les droits de l’homme est donc non seulement honteuse, mais aussi incompréhensible, car elle semble saper les efforts déployés par l’UE et l’ASEAN pour inverser l’aggravation de la situation des droits humains au Myanmar.
Nous demandons instamment aux deux parties de reconsidérer sérieusement cette invitation et d’exclure les représentants de la junte du dialogue sur les droits de l’homme entre l’UE et l’ASEAN. Cela enverrait un message clair et de principe à l’armée du Myanmar : tant qu’elle poursuit sa litanie d’atrocités, elle n’a pas à envoyer de représentant à un dialogue sur les droits de l’homme. Cela permettrait à l’UE et à d’autres représentants de l’ASEAN de tenir des discussions plus ouvertes et plus franches sur la manière de mieux répondre à la crise des droits humains au Myanmar, en échangeant plus librement sur les lacunes de l’un ou l’autre bloc. Cela permettrait également de répondre aux préoccupations en matière de sécurité que certains représentants du forum des OSC peuvent percevoir, et de renforcer la crédibilité du dialogue UE-ASEAN sur les droits de l’homme.