Iran : Meta doit protéger le mouvement #MeToo iranien
Un vaste réseau de défenseur·ses des droits des femmes iraniennes, de militant⸱es féministes et de personnalités publiques, qui font partie du mouvement #Me Too en Iran et au sein de la diaspora, font l’objet d’attaques coordonnées de la part de robots et de trolls sur Instagram dans le but d’étouffer leur liberté d’expression et de nuire à leur présence et à leur influence en ligne. Le grand nombre de faux followers qui inondent leurs comptes fait partie d’une campagne soutenue et financée.
ARTICLE 19, Access Now, United for Iran et Front Line Defenders exhortent Meta, la société mère d’Instagram, à enquêter immédiatement sur ces faux followers et à employer plus de moyens pour protéger la liberté d’expression de ces défenseur⸱ses des droits humains, militant⸱es et personnes.
En tant que dernière plateforme de réseaux sociaux non censurée en Iran, Instagram s’impose comme un espace en ligne crucial où les Iranien·nes peuvent exercer leurs droits d’accès à l’information et à la liberté d’expression. Nos organisations documentent systématiquement les préjudices et les défis importants liés à la modération du contenu pour la langue persane et la communauté iranienne sur cette plateforme vitale. Nous soulignons comment les partisans de la République islamique d’Iran ou des groupes qui leur sont directement affiliés déploient de nouvelles méthodes pour étouffer la parole des défenseur·ses et des militant·es, comme la censure du hashtag qui exprime la solidarité avec les familles des victimes de l’avion d’Ukraine Airlines abattu par des tirs des Gardiens de la révolution en Iran.
Depuis mai 2022, la campagne ciblant divers défenseur·ses des droits des femmes et des comptes Instagram féministes utilise notamment la tactique qui consiste à inonder les comptes de milliers de faux abonnés. Les faux followers semblent être soient des bots soit des trolls. Des recherches menées par Qurium, une organisation spécialisée en criminalistique numérique et en sécurité, ont tracé ces faux abonnés à des entreprises payées pour générer les abonnés basés au Pakistan. Qurium estime que des milliers de dollars américains sont investis à cette fin. Pour le compte @me_too_movement_iran, Qurium a révélé que 3 000 nouveaux abonnés avaient été ajoutés quotidiennement depuis plusieurs semaines.
Ces faux followers façonnent une campagne de harcèlement en faisant de nombreux commentaires pour intimider et réduire au silence ces utilisateurs. Les faux followers nuisent également à la crédibilité des comptes qu’ils ciblent, ce qui entraîne une perte importante d’intérêt, de likes et de vues. Cette campagne noie essentiellement le véritable engagement et la sensibilisation que ces comptes avaient auparavant. Il s’agit d’une nouvelle méthode très inquiétante employée contre un réseau de groupes de défense des droits des femmes, qui fait l’objet de représailles soutenues de la part de l’État et de la société suite à leurs campagnes réussies contre les abus sexuels, plus récemment dans l’industrie du cinéma.
Jusqu’à présent, Meta est lent pour enquêter sur ce problème, même si ces faux followers violent la politique de Meta relative au comportement non authentique. Ces faux followers n’ont pas un comportement typique de bots, et sont potentiellement exploités par de vrais humains dans ces fermes de trolls rémunérées. Malgré ces complexités, Meta dispose de suffisamment de documentation et de preuves par l’intermédiaire des chercheurs du Qurium et des preuves concordantes données par les femmes directement touchées, décrites dans les médias et fournies directement à Meta pour justifier une action rapide.
Nos organisations exhortent Meta à donner la priorité à ses enquêtes et à demander des comptes à ces fermes de trolls rémunérées. Nous sommes profondément préoccupées par le fait qu’ils pourraient être embauchés par des acteurs associés à des États tels que la République islamique d’Iran qui profiterait de l’étouffement de la voix de ces défenseur·ses des droits des femmes.
Ces faux followers doivent faire l’objet d’une enquête et être supprimés. Meta doit agir rapidement pour mettre fin aux préjudices infligés aux défenseur·ses des droits des femmes iraniennes et assurer de toute urgence la protection de leur liberté d’expression sur la plateforme.