Un forum international surveillera la situation des droits humains au Honduras pendant la crise du COVID-19
Historiquement, le Honduras est confronté à de profonds défis pour garantir les droits humains. Le pays est l'un des plus violents au monde ; il a l'un des taux de perception de la corruption les plus élevés, l'impunité est endémique et 66% de sa population vit dans des conditions de pauvreté. Dans ce contexte, la défense des droits humains dans le pays nécessite un effort extraordinaire.
Face à cette situation, 35 organisations internationales et nationales possédant une vaste expérience dans la promotion et la défense des droits humains ont collaboré pour créer le "Forum international des droits humains au Honduras" afin de suivre et de rendre visible la situation du pays au niveau international, générer des analyses et des actions conjointes basées sur les normes internationales, et garantir le respect des normes en matière de droits humains pour l'ensemble de la population.
Plus particulièrement, dans le contexte de l'urgence mondiale causée par le virus COVID-19, le Forum suivra les mesures mises en œuvre par l'État hondurien pour répondre à la crise et leur impact sur les parties les plus vulnérables de la population.
Nous craignons que l'urgence sanitaire, associée à un système de santé précaire, à la faiblesse des institutions, à la pénurie et à la privatisation des ressources en eau ; ainsi qu'aux graves problèmes de corruption, de militarisation et d'exploitation des ressources naturelles, aggravent les risques auxquels le peuple hondurien est confronté. Le Forum dénonce les mesures prises par l'État du Honduras face à la crise, tant dans ses actions que dans ses omissions, notamment la suspension des garanties constitutionnelles, ce qui permet de nouvelles violations des droits humains.
Ces dernières semaines, un manque de conditions adéquates pour dispenser les soins aux patients a été signalé dans les centres hospitaliers, ainsi que le manque de matériel et de mesures de biosécurité pour le personnel de santé. Il existe également des inquiétudes quant à d'éventuels actes de corruption concernant le budget alloué pour faire face à la crise.
Parmi les violations déjà signalées figurent : des attaques documentées contre au moins 45 défenseur-ses des droits humains et 7 journalistes ; l'arrestation arbitraire de la FDDH Aleyda Huete dans le département de Choluteca ; ainsi que le meurtre de la FDDH Iris Argentina Álvarez lors d'une expulsion violente alors qu'un couvre-feu est imposé ; l'expulsion d'au moins 60 migrants d'origine haïtienne et africaine ; les pénuries d'eau dans différentes régions du pays et de nombreux autres cas.
La situation de surpopulation et de militarisation à laquelle sont confrontés les détenus incarcérés dans le système pénitentiaire hondurien, où ils ne disposent pas des conditions nécessaires pour empêcher la contagion, est préoccupante. Nous dénonçons en particulier la situation des défenseur-ses des droits humains criminalisés, tels que les défenseur-ses des eaux de Guapinol qui sont maintenus en détention préventive malgré les multiples recours déposés depuis plus de 7 mois.
L’International Forum for Human Rights in Honduras (Forum international des droits humains au Honduras) insiste sur le fait qu'aucune mesure visant à répondre à la pandémie ne doit autoriser ou excuser les violations des droits humains. Ces mesures ne devraient pas non plus privilégier les intérêts privés ou commerciaux, en particulier dans le secteur extractif, par rapport au bien-être général de la population Au contraire, les mesures doivent être proportionnées et nécessaires pour la prévention, le diagnostic, le traitement et l'endiguement de la pandémie, doivent respecter les normes fondamentales relatives aux droits humains et être axées sur le genre, et elles doivent être élaborées avec la participation des organisations de la société civile.
L'État, en tant que garant de la protection de la santé puis du droit à la vie, doit garantir à l'ensemble de la population, sans discrimination, l'accès aux mesures préventives recommandées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), y compris un diagnostic et un traitement adéquats, l'accès à l'eau et aux conditions de biosécurité nécessaires. Dans le même temps, l'accès de l'ensemble de la population à des informations pertinentes, opportunes, claires, scientifiques et de qualité sur la pandémie doit être garanti, et le travail des journalistes indépendants doit donc également être garanti.
Nous appelons l'État à reconnaître le travail essentiel des défenseur-ses des droits humains, du droit à la terre et au territoire, et à garantir les conditions nécessaires pour qu'ils puissent travailler en toute sécurité. L'État doit mettre fin à la répression et à la criminalisation de la population et s'abstenir d'employer l'armée pour des tâches de sécurité publique ou pour l'administration des prisons.
Nous demandons aux autorités honduriennes d'adopter des mesures pour réduire la surpopulation carcérale, faciliter des mesures alternatives plutôt que la détention préventive des DDH emprisonnés et garantir les conditions de prévention et de traitement du virus dans les prisons, comme le demandent les organisations internationales. Les mesures prises à cet égard ne doivent pas signifier la libération ou la levée de la responsabilité des personnes poursuivies ou condamnées pour des crimes graves ou des violations des droits humains.
De manière générale, nous demandons à l'État hondurien de prendre des mesures différenciées pour garantir les droits humains des segments les plus vulnérables de la population, tels que les prisonniers, les personnes handicapées, les migrants, les peuples autochtones et afro-honduriens, les défenseurs des droits humains, les journalistes, les personnes âgées adultes, les personnes LGBTIQ+, les sans-abri, les travailleurs du sexe, le personnel de santé, les femmes, les garçons et les filles. L'État doit réagir en garantissant la vie, l'intégrité et la santé de tous et, face aux effets économiques de la crise, en garantissant les moyens de subsistance, la nourriture, le logement et le travail, sans discrimination. Ceci conformément aux différentes directives indiquées par les organisations internationales.
L'International Forum for Human Rights in Honduras (Forum international des droits humains au Honduras) restera vigilant dans le suivi de la situation des droits humains dans le pays, dénoncera toute violation et exigera que l'État réagisse à l'urgence provoquée par le COVID-19 conformément à ses obligations internationales.
De ce nouvel effort de collaboration, les organisations suivantes qui composent le Forum réitèrent leur engagement à garantir les droits humains de l'ensemble de la population hondurienne.
Les membres du Forum :
Organisations internationales
- Amnesty International
- Just Associates (JASS) – Mesoamérica
- Center for Justice and International Law (CEJIL)
- Entrepueblos
- Foro Honduras Suiza
- Urgent Action Fund – Latin America & the Caribbean (FAU-AL)
- Front Line Defenders
- Fundación Acceso
- Due Process of Law Foundation (DPLF)
- Latin America Working Group (LAWG)
- Organisations mondiale contre la torture (OMCT)
- International Platform against Impunity
- Trocaire
Orgnisations nationales
- Comité por la Libre Expresión (C-Libre)
- Pastoral Social-Cáritas de Honduras. Diócesis de San Pedro Sula.