Ne piétinez pas les droits humains en Érythrée
Suite à l'annonce du vote imminent du Conseil de sécurité de l'ONU sur la levée des sanctions contre l'Érythrée, notamment un embargo sur les armes, Front Line Defenders appelle les gouvernements britannique et français à voter contre la résolution et à maintenir leur position déclarée, à savoir, que le gouvernement érythréen doit améliorer la situation des droits humains dans le pays avant qu'une telle résolution ne puisse être adoptée.
Front Line Defenders salue les récentes avancées quant aux relations internationales de l'Érythrée, telles que son rapprochement avec l'Éthiopie et des discussions en cours avec Djibouti, et l'organisation espère qu'il s'agisse des premiers pas vers une série de changements positifs dans le pays.
Cependant, malgré ces signes encourageants, la levée des sanctions ne devrait pas être envisagée tant que le gouvernement érythréen n'aura pas mis en place des mesures pratiques pour améliorer la situation des droits humains dans le pays. Un premier pas serait la libération de Dawit Isaak et d'autres défenseur-ses des droits humains actuellement détenus dans les prisons érythréennes. Le minimum serait que le Comité international de la Croix Rouge soit autorisé à accéder aux prisons et que les prisonniers bénéficient de tous les soins médicaux dont ils ont besoin.
Selon un rapport publié en juin par le Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits humains en Érythrée, aucun effort n'a été fait pour améliorer la situation des droits humains dans le pays. Cela est vrai malgré le dégel des relations diplomatiques avec les pays voisins ; au niveau national, il n'y a toujours aucune législature, aucune presse libre et aucune constitution. Le citoyen moyen n'a aucun droit fondamental et les citoyens considérés comme des dissidents sont emprisonnés ou disparaissent de force.La levée des sanctions sans demander au pays de respecter les normes minimum en terme de droits humains, comme en 2015 avec le fond de développement de l'UE (200 millions d'euros) pour soutenir l'énergie et la gouvernance en Érythrée, envoie un message clair : le gouvernement peut simplement faire attendre la communauté internationale en ce qui concerne les droits humains.
Sans une approche du développement basée sur les droits, qui reconnait une variété d'acteurs et de facteurs qui contribuent à une démocratie saine, la société civile et les défenseur-ses des droits humains seront laissés à l'écart. Puisque cette année l’on s’apprête à célèbrer le 70e anniversaire de la déclaration universelle des droits de l'Homme et le 20e anniversaire de la Déclaration de l'ONU sur les défenseur-ses des droits humains, ce vote du conseil de sécurité de l'ONU ne ferait que porter un coup aux droits humains dans le monde entier.
Front Line Defenders appelle la France et le Royaume-Uni à maintenir leur position, c'est à dire, insister afin que la question essentielle des droits humains en Érythrée soit traitée avant de lever les sanctions ; un développement de grande ampleur et inclusif ne sera possible que dans un pays où les défenseur-ses des droits humains et la société civile sont encouragés à participer. Continuer à jeter en prison les défenseur-ses des droits humains et les journalistes comme Dawit Isaak empêchera un développement et des progrès dont le pays a vraiment besoin.