Crimée (Ukraine) : Répression contre les avocats criméens
Front Line Defenders est profondément préoccupée par la recrudescence des actions ciblées contre les avocats des droits humains dans la péninsule de Crimée annexée par la Russie. Depuis le début de l’occupation, les avocats en droits humains activement impliqués dans la représentation et la défense des droits des Tatars de Crimée sont devenus l’une des principales cibles des autorités russes. Depuis le 26 mai 2022, les défenseurs des droits humains et avocats Edem Semedliaev, Aider Azamatov, Nazim Sheikhmambetov et la défenseuse des droits humains et avocate Emine Avamileva ont été arrêtés et placés en détention pour diverses accusations administratives.
Le 26 mai 2022, des agents du Centre de lutte contre l’extrémisme du ministère de l’Intérieur de la Fédération de Russie ont arrêté et détenu le défenseur des droits humains et avocat Edem Semedliaev à Simferopol, en Crimée. Le défenseur des droits humains est poursuivi pour avoir été tagué dans une publication sur Facebook qui « discréditerait les actions des forces armées russes ». Le tribunal du district de Kyiv à Simferopol a reconnu Edem Semedliaev coupable de cette accusation et lui a infligé une amende de 75 000 roubles (1050 Euro).
Le même jour, le 26 mai 2022, immédiatement après l’audience d’Edem Semedliaev, l’avocat de la défense d’Edem Semedliaev, Nazim Sheikhmambetov, a été arrêté par les agents du Centre de lutte contre l’extrémisme du ministère de l’Intérieur. Nazim Sheikhmambetov est accusé d’avoir violé l’article 20.2.2 du Code administratif de la Fédération de Russie. Le 26 octobre 2021, l’avocat en droits humains aurait enfreint la réglementation relative sur le COVID-19 en ne portant pas de masque et en ne pratiquant pas la distanciation sociale dans un lieu public, car il « participait volontairement à un événement de masse impliquant une coprésence dans un lieu public pour soutenir les ressortissants tatars de Crimée détenus ». Le défenseur des droits humains et avocat Edem Semedliaev était l’avocat de Nazim Sheikhmambetov. Après son arrestation, Nazim Sheikhmambetov a été conduit dans les locaux du ministère des Affaires intérieures de la péninsule de Crimée à Simferopol. Nazim Sheikhmambetov a été condamné à 8 jours d’arrestation administrative et est actuellement en liberté.
Le 27 mai 2022, le défenseur des droits humains et avocat, Aider Azamatov, et la défenseuse des droits humains et avocate, Emine Avamileva, ont été arrêtés et détenus par les forces de l’ordre lorsqu’ils se sont présentés en tant qu’avocats de la défense de Nazim Sheikhmambetov. Le 28 mai 2022, le tribunal de district central de Simferopol a condamné Aider Azamatov et Emine Avamilev à huit et cinq jours de détention administrative respectivement. Ces accusations sont également liées au 25 octobre 2021, lorsque les deux avocats des droits humains ont agi comme avocats de la défense d’Edem Semedliaev. Les deux avocats ont été accusés en vertu de la partie 1 de l’article 20.2.2 du Code administratif de la Fédération de Russie pour « l’organisation simultanée de rassemblement de masse et/ou de déplacements de citoyens dans des lieux publics, entraînant une violation de l’ordre public ». Ils sont actuellement tous les deux en liberté.
Le ciblage et la persécution systémique des avocats en droits humains par les services fédéraux de sécurité russes suivent une tendance inquiétante en Crimée depuis son annexion en 2014. Cette persécution systémique comprend l’acharnement judiciaire, des perquisitions de leurs bureaux, des sanctions disciplinaires et des menaces de radiation. Un autre éminent défenseur des droits humains et avocat criméen, Emil Kurbedinov, a été condamné à plusieurs reprises à des détentions de courte durée en 2017 et 2018 pour avoir publié des documents relatifs à Hizb-ut Tahrir sur les réseaux sociaux. Peu après l’arrestation d’Emil Kurbedinov en 2017, les services de sécurité fédéraux russes ont perquisitionné son bureau et celui d’Edem Semedliaev et saisi divers objets personnels et professionnels qui leur appartenaient. Une autre éminente défenseuse des droits humains et avocate de Crimée, Lilia Gemedzy, a fait face à une sanction disciplinaire pour « violations répétées du règlement des audiences à la Cour » en 2020. En 2021, les autorités russes ont soumis Edem Semedliaev à de l’acharnement judiciaire, l’accusant d’avoir refusé de se déshabiller lorsque la police cherchait des « tatouages extrémistes » sur son corps.
Front Line Defenders est profondément préoccupée par la détention et l’arrestation des défenseurs des droits humains Edem Semedliaev, Aider Azamatov et Nazim Sheikhmambetov et de la défenseuse des droits humains Emine Avamileva, et croit qu’ils sont uniquement ciblés en raison de leur travail légitime et non violent en tant qu’avocats en droits humains. Le ciblage et la persécution systémique des avocats en droits humains par les autorités russes font partie d’une tendance inquiétante en Crimée depuis son annexion en 2014. Cette persécution systémique comprend des poursuites judiciaires soutenues, des descentes dans les bureaux, des sanctions disciplinaires et des menaces d’être radié du Barreau. Front Line Defenders exhorte les autorités russes à mettre fin à tous les actes de harcèlement, y compris aux niveaux administratif et judiciaire, contre tous les défenseur⸱ses des droits humains et toutes les organisations en Crimée.