Inquiétudes concernant le manque de protection et l’augmentation de la violence contre les défenseur-ses des droits humains LGBTIQ+
Front Line Defenders est profondément préoccupée par l’augmentation de la violence, des propos haineux et du harcèlement contre les organisations et les personnes qui défendent les droits des LGBTIQ+ au Honduras. L'absence de mesures pour prévenir les attaques et les discours haineux contre les défenseur-ses des droits des LGBTIQ+ à l’approche des élections législatives du 28 novembre 2021 est particulièrement préoccupant.
L’intensification des discours haineux et du harcèlement par les médias et les groupes religieux fondamentalistes contre les organisations et les individus qui œuvrent pour la reconnaissance et le respect des droits de la communauté LGBTIQ+ se déroule dans un contexte de forte discrimination et de violence. Selon les organisations locales, l’impunité pour les crimes haineux commis contre la communauté LGBTIQ+ de 2009 à ce jour dépasse les 90%.
Dans ce contexte, des organisations telles que l’Asociación Arcoíris et le Centro para el Desarrollo y la Cooperación LGBTI -Somos CDC- soutiennent les victimes de violence en développant des programmes et des initiatives de coopération dans les domaines de l’éducation, la santé sexuelle, la participation civile et les droits humains pour la population LGBTIQ+. Depuis 2008, l’organisation SOMOS CDC milite pour un recours en inconstitutionnalité contre la loi de réforme de 2005 qui interdit la reconnaissance du mariage homosexuel dans le pays. Cette action en justice expose les membres de l’organisation à des attaques et du harcèlement.
Le 6 août 2021, un agent de sécurité privé du conseil local de Payaquí s’est rendu dans les bureaux de SOMOS CDC, dans la ville de Tegucigalpa, et a informé le directeur de l’organisation et défenseur des droits humains Alex Sorto que l’administrateur du conseil local, le conseil d’administration et la sécurité privée du quartier Payaquí à Tegucigalpa étaient mécontents du travail de l’organisation en faveur de la promotion et de la défense des droits humains des personnes LGTBIQ+. Le même jour, le SOMOS CDC a lancé des appels d’alerte au Système national pour la protection des défenseur-ses des droits humains, des journalistes, des communicateurs sociaux et des opérateurs de justice, mais toutes ses demandes ont été rejetées. Depuis 2016, SOMOS CDC bénéficie des mesures de protection du Système National au Honduras en raison des risques encourus pour son travail de plaidoyer
Le 7 août 2021, le défenseur des droits humains Alex Sorto a remarqué que sa voiture avait été ouverte de force et que son ordinateur, son appareil photo et son portefeuille contenant ses pièces d’identité et cartes personnelles avaient été volés à Tegucigalpa. Il a signalé l’incident au ministère de la Sécurité mais les autorités l’ont classé comme un simple vol qualifié.
Le 19 août 2021, le défenseur des droits humains Donny Reyes, membre de l’association Arcoíris et directeur du CIPRODEH, a réalisé qu’un agent de sécurité privé le filmait alors qu’il quittait les bureaux du SOMOS CDC. Le 21 août 2021, après avoir déposé une demande de protection juridique devant la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice contre l’État du Honduras pour lui avoir refusé le droit de se marier, Donny Reyes a déclaré avoir été victime d’un vol qualifié par des inconnus qui ont fracturé la serrure et la fenêtre de sa voiture et volé ses papiers et ceux de son partenaire. Bien que le défenseur ait signalé l’incident aux autorités, aucune enquête officielle n’a été ouverte.
Des responsables publics de haut niveau ont fait des déclarations stigmatisantes pendant la campagne électorale qui ont mis les défenseurs LGBTIQ+ en danger. Le 7 septembre 2021, le représentant du Parti national du Honduras à la Commission politique du Conseil électoral national, Fernando Andulay, a déclaré dans une interview que discuter du mariage pour tous dans le contexte électoral est une agression directe contre l’Église, le plan de Dieu pour la famille et son fonctionnement en conformité avec la constitution de la République.
Le 15 septembre 2021, le président Juan Orlando Hernández a prononcé un discours public national à l'occasion du bicentenaire de l’indépendance du Honduras dans lequel il qualifiait ceux qui promeuvent le mariage homosexuel d'"ennemis de l’indépendance".
Le 19 septembre 2021, Nasry Asfura, maire du district central et candidat à la présidence du Parti national du Honduras a répondu dans une interview que le mariage pour tous n’est pas une question discutable dans sa campagne "Papi, la création de Dieu n’est pas discutable".
Le 26 septembre 2021, la défenseuse des droits humains LGBTIQ+ Tatiana Garcia a été assassinée à son domicile, dans la ville de Santa Rosa de Copán. Tatiana Garcia était une défenseuse trans bien connue dans sa communauté, qui travaillait comme facilitatrice juridique et offrait un accompagnement aux personnes LGBTIQ+ et aidait à déposer des plaintes concernant des violations depuis 2018. Tatiana Garcia a signalé à ses collègues qu’elle avait reçu des menaces de la part de groupes conservateurs de sa communauté dans les jours précédant son assassinat.
Le Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des défenseur-ses des droits humains a déjà fait part de ses préoccupations concernant l’inaction de l’État hondurien pour réduire les discours haineux contre la communauté LGBTIQ+ et a demandé au gouvernement de s’attaquer à la violence et à l’intimidation contre les personnes qui promeuvent les droits des personnes LGBTIQ+.
Front Line Defenders est profondément préoccupée par l’escalade des discours haineux générés par les autorités honduriennes et largement diffusés dans les médias contre les personnes qui œuvrent pour la reconnaissance des droits de la communauté LGBTIQ+ dans le pays. Elle met également en garde contre le fait que, dans le cadre de campagnes électorales, de tels messages mettent en péril de façon exponentielle l’intégrité physique de celles et ceux qui défendent légitimement leurs droits humains, et exhorte les autorités à protéger toutes les personnes et organisations qui défendent les droits des LGBTIQ+ face aux attaques, intimidation et discrimination.