Appel à la libération immédiate et au transfert en Irlande pour raisons médicales de l’éminent défenseur des droits humains et citoyen danois et bahreïni, Abdulhadi Al-Khawaja
Front Line Defenders est profondément préoccupée par la santé de l’éminent défenseur des droits humains et citoyen danois bahreïni, Abdulhadi Al-Khawaja, qui purge actuellement une peine d’emprisonnement à vie au Bahreïn pour avoir exercé ses droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique.
Suite aux actes de torture et aux mauvais traitements bien documentés que le défenseur a subis aux mains des autorités bahreïnies1, Abdulhadi Al-Khawaja souffre d’une série de problèmes de santé chroniques et dégénératifs et nécessite un traitement médical expert en temps opportun. Cependant, selon de récents rapports, entre janvier et avril 2022, les autorités bahreïnies ont activement refusé de donner les traitements médicaux nécessaires au défenseur des droits humains, et de le laisser se rendre aux rendez-vous médicaux.
Depuis janvier 2022, le défenseur aurait été empêché d’assister à au moins deux rendez-vous prévus concernant sa vue qui se détériore et à un troisième rendez-vous concernant ses douleurs chroniques au dos et à la hanche. De plus, ses séances de kinésiothérapie sont complètement interrompues. Une série de tests nécessaires, y compris un test sanguin, ordonnés par le médecin en janvier 2022, ont été retardés à plusieurs reprises, les autorités pénitentiaires citant le coronavirus comme excuse. Le 20 mars 2022, des analyses sanguines auraient été effectuées pour chaque détenu du bloc d’Abdulhadi Al-Khawaja, à l’exception du défenseur. De nombreux détenus n’avaient aucune idée de la raison pour laquelle ces tests sanguins étaient effectués, ce qui montre bien le refus ciblé de traitement médical.
La demande de Front Line Defenders pour la libération immédiate d’Abdulhadi Al-Khawaja en Irlande pour raisons médicales est appuyée par l’avis médical du professeur Damian McCormack, BSc, Mch, FRCS (Orth.) qui a fourni une évaluation médicale indépendante sur l’état d’Abdulhadi Al-Khawaja et a donné des conseils sur les prochaines étapes cruciales. En se fondant sur les preuves disponibles, le professeur McCormack a publié ce rapport le 1er avril 2022 et a conclu que « la santé de M. Al-Khawaja est défaillante en raison de multiples problèmes potentiels, qui sont tous susceptibles de faire l’objet d’un examen et d’un traitement plus poussés. Lui refuser cela serait, à mon avis, tout à fait non professionnel du point de vue médical et constituerait en fait une négligence grave. »
L’opinion médicale experte de M. McCormack comprend des recommandations dont Al-Khawaja a besoin de toute urgence :
• « une imagerie complète de la colonne vertébrale avec IRM — imagerie cervicale, thoracique et lombaire qui devrait être examinée par un chirurgien orthopédiste spécialiste de la colonne vertébrale compétent » ;
• « des analyses sanguines pertinentes, un examen physique et une biopsie possible par un urologue compétent »;
• « une évaluation ophtalmique urgente et peut-être une intervention chirurgicale provisoire d’un chirurgien ophtalmique compétent » ;
• « une évaluation immédiate par un spécialiste en chirurgie maxillo-faciale compétent pour une imagerie plus poussée de l’articulation temporo-mandibulaire et éventuellement une chirurgie de révision ou une autre intervention chirurgicale de cette zone » ;
• « un examen dentaire,… par un orthodontiste ou un dentiste compétent »
• « un examen par un endocrinologue/conseiller métabolique compétent » ;
• « un aiguillage vers un programme compétent de gestion de la douleur » ;
• Abdulhadi Al-Khawaja devrait être « examiné immédiatement par un cardiologue ».
Étant donné qu’Abdulhadi Al-Khawaja n’a pas reçu de traitement médical adéquat et en temps opportun et compte tenu de l’avis médical du Professeur McCormack, Front Line Defenders appelle à la libération immédiate du défenseur et à ce qu’il soit envoyé en Irlande pour raisons médicales. Il est impératif qu’il ait accès de toute urgence au soutien médical spécialisé dont il a besoin.
Front Line Defenders relaie également les appels de la famille Al-Khawaja afin qu’un rapport médical détaillant les complications qu’Abdulhadi Al-Khawaja connaît depuis la première chirurgie de quatre heures sur son visage et sa mâchoire, suite au passage à tabac brutal lors de son arrestation, soit remis à lui et à sa famille. Ce rapport médical détaillé a été ordonné par le tribunal, mais les autorités ne se sont pas encore conformées.
Contexte : Ancien coordinateur de la protection de Front Line Defenders pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (MOAN), ancien président du Bahrain Centre for Human Rights (BCHR) et cofondateur du Gulf Centre for Human Rights (GCHR), Abdulhadi Al-Khawaja œuvre depuis longtemps en faveur de la promotion des droits humains dans la région MOAN et à la protection des défenseur⸱ses des droits humains en danger.
En février 2011, des manifestations ont éclaté dans tout le Bahreïn pour réclamer de plus grandes libertés politiques. Dans le cadre de la répression gouvernementale contre ces manifestations, les dirigeants de l’opposition et les principaux défenseur⸱ses des droits humains, dont Abdulhadi Al-Khawaja, ont été arrêtés.
Il y a onze ans cette semaine, le 9 avril 2011, jusqu’à vingt policiers armés et masqués se sont introduits dans la maison de la famille Al-Khawaja au milieu de la nuit, traînant le défenseur dans les escaliers alors même qu’il avait accepté de les suivre pacifiquement. Ils l’ont frappé avec force, notamment en lui donnant des coups de pied à la tête. Après son arrestation, il a dû subir une opération chirurgicale de quatre heures au visage et à la mâchoire.
Le 22 juin 2011, Abdulhadi Al-Khawaja a été injustement condamné à la prison à vie.
Pour rendre hommage à sa lutte pour les droits humains et la démocratie au Bahreïn et dans la région MOAN, Abdulhadi Al-Khawaja a reçu le Prix de la liberté 2012, le Prix Politikens Frihedspris 2012 [Prix de la liberté], le Prix Dignité - Monde sans Torture 2013 et le Prix Martin Ennals 2021 pour les individus et les organisations qui font preuve d’un engagement exceptionnel pour la défense et la promotion des droits humains, malgré les risques que cela implique. Le Prix Martin Ennals sera remis lors d’une cérémonie le 2 juin 2022.