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5 Juillet 2024

Burkina Faso : Inquiétude concernant l'émission d'avis de recherche et des menaces de mort persistantes à l'encontre de défenseurs de droits humains

Front Line Defenders exhorte aux autorités du Burkina Faso de prendre des mesures immédiates pour mettre fin aux campagnes de harcèlement en ligne contre les défenseurs de droits humains. En date du 13 juin 2024, un avis de recherche criminel a été publié anonymement sur Facebook à l'encontre de dix personnes, dont six défenseurs des droits humains et journalistes. Cet avis de recherche anonyme indique que les services de sécurité burkinabés recherchent activement les défenseurs des droits humains Touré Naïm, Inoussa Ouédraogo, Yacouba Ladji Bama, Issaka Lingani et Barry Ahmed Newton. Ces recherches sont motivées par de fausses accusations de complicité avec des groupes terroristes, de trahison et de complicité avec des groupes de mercenaires pour déstabiliser le Burkina Faso.

Touré Naïm est un militant activement engagé dans la lutte contre la mauvaise gestion des fonds publics et les violations des droits humains fondamentaux, en particulier le droit à la vie, à la liberté d'expression, à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association. Inoussa Ouédraogo, Yacouba Ladji Bama, Issaka Lingani et Barry Ahmed Newton sont quatre journalistes qui travaillent sur les questions et violations touchant à la liberté d'expression, à la liberté de la presse et qui, parallèlement, documentent et surveillent les violations des droits humains au Burkina Faso.

En date du 13 juin 2024, un avis de recherche d'individus criminels a été publié anonymement sur Facebook à l'encontre de dix personnes, dont six défenseurs de droits humains et journalistes. Cet avis de recherche indique que les services de sécurité burkinabés recherchent activement les défenseurs de droits humains Touré Naïm, Inoussa Ouédraogo, Yacouba Ladji Bama, Issaka Lingani et Barry Ahmed Newton. La raison invoquée pour ces recherches est la complicité avec des groupes terroristes, la trahison et la complicité avec des groupes de mercenaires pour déstabiliser le Burkina Faso. L'avis de recherche a été publié par des sources anonymes : "Nous sommes anonymes, nous sommes burkinabés, nous ne pardonnons pas, nous n'oublions pas. Nous sommes parmi vous, nous mangeons avec vous. Soyez prêts à nous accueillir". L'avis de recherche criminel précisait que toute personne ou groupe qui contribuerait à appréhender les personnes recherchées ou à les neutraliser recevrait 20 millions de francs par personne.

Les défenseurs des droits humains Touré Naïm, Inoussa Ouédraogo, Yacouba Ladji Bama, Issaka Lingani et Barry Ahmed Newton ont respectivement fait l'objet de multiples harcèlements en ligne en raison de leur travail de défenseurs des droits humains.

Touré Naïm fait l'objet de menaces de mort incessantes et de harcèlement en ligne sur Facebook et Whatsapp depuis 2023, en raison de son activisme, de ses appels exigeant la transparence du gouvernement et que la justice soit établie. Une vidéo postée sur Tik Tok par des auteurs inconnus l’a décrit comme un terroriste et l'a surnommé "Abou Saïd". La vidéo appelait la population à rechercher Touré Naïm, à l'arrêter et à le renvoyer au Burkina Faso.

Inoussa Ouédraogo et sa famille ont également été victimes de harcèlement en ligne sur Facebook et Whatsapp à plusieurs reprises, ainsi que de menaces sur certaines stations de radio, et ce depuis décembre 2022. Le défenseur de droits humains a reçu un jour un appel menaçant, dans lequel on lui disait : "Tu dois faire très attention, arrête de te mêler de ce qui ne te regarde pas. Vous pensez que vous êtes caché, mais nous savons où vous vivez". Dans la nuit du 13 août 2023, sa maison et sa famille ont été placées sous surveillance par les potentiels harceleurs.

Yacouba Ladji Bama subi constamment des harcèlements en ligne et fut l’objet de menaces de mort imminent au cours des deux dernières années en raison de ses activités de plaidoyer pour la redevabilité du gouvernement et de sa campagne contre l'impunité. Parmi ces menaces en ligne, reçues principalement sur Facebook, il a été posté : "a) La mort est préférable pour Ladji Bama, l'exécution ; b) Dites à Ladji Bama que le gouvernement ne se contentera pas d'éliminer ceux qui s'opposent au gouvernement, mais qu'ils seront également brûlés ; c) Ladji Bama, nous vous détruirons".

Depuis deux ans, Issaka Lingani reçoit constamment des menaces et des insultes sur les médias sociaux, ainsi que dans les émissions de radio et de télévision interactives. Entre juin et octobre 2023, dix adolescents internautes et activistes ont été enlevés et torturés par les escadrons de la mort du régime politique actuel. Le but principal de leurs interrogatoires était d'obtenir des aveux concernant des conspirations qui impliqueraient Issaka Lingani. Entre les mois de juin et juillet 2023, avec d'autres défenseurs des droits humains et médias qui avaient été la cible d'une importante campagne de menaces et d'appels malveillants, il a créé une organisation de la société civile appelée "Collectif des Journalistes, Activistes et Leaders d'Opinions Victimes de Menaces" (Joola menacés) pour les activistes, les journalistes et les défenseurs de droits humains menacés.

Depuis janvier 2022, Barry Ahmed Newton reçoit des menaces de mort de la part de partisans du régime militaire du Burkina Faso, qui le qualifient d'”apatride", et ces menaces se sont intensifiées en décembre 2022. Il a été poursuivi en justice de nombreuses fois et fait l'objet de plus de huit procès intentés contre lui pour ses opinions et critiques sur les violations des droits humains et les meurtres de masse sous prétexte de lutte contre le terrorisme.

Front Line Defenders exprime sa profonde inquiétude concernant la sécurité et la protection des défenseurs des droits humains Touré Naïm, Inoussa Ouédraogo, Yacouba Ladji Bama, Issaka Lingani et Barry Ahmed Newton. L'organisation condamne fermement les cas récents de harcèlement en ligne, de menaces, d'intimidation et de surveillance dont ils ont fait l'objet et qui, selon elle, visent à entraver leur travail précieux et pacifique de défense des droits humains au Burkina Faso. L'organisation rappelle aux entreprises de médias sociaux qu'elles ont la responsabilité de placer les droits humains au premier plan et de s'assurer que leurs plateformes ne contribuent pas à la violence et aux campagnes dangereuses, ou qu'elles ne permettent pas à leurs utilisateurs de les utiliser dans le même but contre des défenseurs de droits humains.

Front Line Defenders exhorte les autorités compétentes du Burkina Faso à prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité et la protection de tous les défenseurs des droits humains et rappelle que tous les défenseurs des droits humains et les journalistes au Burkina Faso doivent mener leur travail de défense de droits humains dans un environnement sûr.