Onze membres du conseil de l'Association médicale turque condamnés à de la prison
Le 3 mai 2019, la 32e haute cour criminelle d'Ankara a condamné 11 membres du conseil de l'Association médicale turque (Turkish Medical Association - "TMA") à des peines de prison pour "provocation à la haine et à l'hostilité", en lien avec deux déclarations publiques qu'ils ont faites pour attirer l'attention sur les effets négatifs de la guerre et du conflit sur la santé publique.
L'Association médicale turque (Turkish Medical Association - "TMA") est une association médicale de professionnels de la santé. Près de 80% de tous les médecins turcs sont membres de la TMA. L'association vise à protéger et promouvoir la santé publique en Turquie, elle contribue à l'éducation médicale ainsi qu'à la protection de la morale de la profession médicale et des droits des médecins. La TMA émet régulièrement des avis sur les déterminants de la santé publique, notamment la paix, l'environnement socio-économique et la démocratie.
Le 3 mai 2019, la 32e haute cour criminelle d'Ankara a condamné 11 membres du conseil de l'Association médicale turque (Turkish Medical Association ("TMA") à des peines de prison pour "provocation à la haine et à l'inimitié", en lien avec deux déclarations publiques qu'ils ont faites pour attirer l'attention sur les effets négatifs de la guerre et du conflit sur la santé publique.
L'Association médicale turque (Turkish Medical Association - "TMA") est une association médicale de professionnels de la santé. Près de 80% de tous les médecins turcs sont membres de la TMA. L'association vise à protéger et promouvoir la santé publique en Turquie, elle contribue à l'éducation médicale ainsi qu'à la protection de la morale de la profession médicale et des droits des médecins. La TMA émet régulièrement des avis sur les déterminants de la santé publique, notamment la paix, l'environnement socio-économique et la démocratie.
Le 20 janvier 2018, le gouvernement turc a annoncé le lancement d'une opération militaire intitulée "rameau d'olivier" à Afrin en Syrie. Le lendemain, le président Recep Tayyip Erdoğan avait prévenu le public que toute personne protestant contre l'opération devrait payer le "prix fort". Le même jour, le gouvernement a ordonné à la presse turque de suivre une liste de directives relatives à la couverture des opérations. La liste indiquait que l'opération devrait être décrite comme visant des organisations terroristes et non des civils, et que les médias devraient donner la priorité à "l'intérêt national" lorsqu'ils partagent des informations diffusées par la presse internationale. Selon le ministère de l'Intérieur, 845 personnes, dont de nombreux journalistes et politiciens, ont été arrêtées du 20 janvier au 26 février 2018 pour avoir participé à des manifestations non autorisées, diffusé de la "propagande terroriste" et "incité le public à la haine et à l'hostilité" en critiquant l'opération sur les réseaux sociaux.
L'Association médicale turque fait régulièrement des déclarations selon lesquelles la guerre est un problème de santé publique. Le 24 janvier 2018, le conseil de la TMA a publié une déclaration intitulée "La guerre est un problème de santé publique!", dans laquelle elle rappelait que chaque guerre provoque des dommages irrévocables sur la santé physique, mentale, sociale et environnementale du public. Les auteurs ont en outre déclaré qu'en tant que professionnels de la santé, ils sont obligés de se rappeler en permanence que leur devoir primordial est de défendre la vie et de s'engager à maintenir un environnement pacifique. La déclaration se terminait par un slogan : "Non à la guerre! La paix maintenant!"
Le 26 janvier 2018, dans un discours public, le président Recep Tayyip Erdoğan a accusé les auteurs de cette déclaration de sympathie envers les terroristes et de ne pas être assez "pour la patrie et la Nation". La TMA a répondu le jour-même en publiant une autre déclaration sur son site web, niant ces fausses accusations. Les auteurs rappelaient aussi qu'il incombe aux autorités de l'État de créer un environnement permettant à chacun d'exprimer librement son opinion sans oppression.
Le 29 janvier 2018, suite à une plainte du ministère de l’Intérieur, le parquet d'Ankara a ouvert une enquête criminelle confidentielle à l’encontre de onze membres du conseil de la TMA. Les onze membres du Conseil de la TMA ont été arrêtés le 30 janvier après un raid de la police chez eux, à 6 heures du matin. La police a saisi plusieurs objets, dont tous leurs appareils électroniques et certains livres.
Suite à leur arrestation, le rectorat de l'université d'Istanbul a suspendu de leurs travaux deux des personnes arrêtées, Raşit Tükel et Taner Gören, pendant trois mois. Şeyhmus Gökalp, un autre des détenus, a été démis de ses fonctions à la Banque centrale de Diyarbakır.
Trois membres du conseil, Sinan Adıyaman, Ayfer Horasan et Horeyhmus Gökalp, ont été remis en liberté provisoire le 2 février 2018 et les huit autres, le 5 février 2018. Le 9 février 2018, la décision de suspendre Raşit Tükel et Taner Gören de leurs travaux pendant trois mois a été levée.
Le 12 octobre 2018, la 32ème Haute Cour criminelle d'Ankara a accepté l'acte d'accusation visant onze membres du Conseil de la TMA. Après avoir reçu l'acte d'accusation, leurs avocats ont compris qu'une deuxième enquête pénale concernant les onze médecins avait été ouverte pour une autre déclaration faite par l'association à l'occasion de la Journée internationale de la paix en 2016. À l'insu des suspects et en violation de la procédure qui oblige le Procureur à recueillir leurs déclarations, les deux enquêtes ont été fusionnées en un seul acte d'accusation.
À la suite d'audiences marquées par des vices de procédure les 27 décembre 2018 et 20 mars 2019, la troisième audience s'est déroulée le 3 mai 2019 devant la 32ème Haute cour criminelle d'Ankara. Les onze accusés, Mehmet Raşit Tükel, Taner Gören, Sinan Adıyaman, Mehmet Sezai Berber, Selma Güngör , Bülent Nazım Yılmaz, Funda Barlık Obuz, Dursun Yaşar Ulutaş, Ayfer Horasan et Şeyhmus Gökalp, ont été condamnés à 20 mois de prison (10 mois pour chaque déclaration) pour "incitation à la haine et à l'hostilité". Les défenseur-ses des droits humains n'ont pas accepté le report de la déclaration de peine afin de pouvoir faire appel. Le tribunal n'a pas non plus suspendu l'exécution de leur peine, au motif qu'ils n'avaient manifesté aucun remords concernant le crime allégué. L'un des membres du Conseil, Hande Arpat, a également été accusé de "propagande terroriste" et a été condamné à une peine supplémentaire d'un an, six mois et 22 jours d'emprisonnement. La condamnation a été prononcée en lien avec ses publications sur les réseaux sociaux en 2016, concernant des femmes membres des YPG (Unités de protection du peuple) qui luttent contre Daech.