Colombie: Menaces de mort contre le Movimiento Rios Vivo Antioquia

Le 26 octobre 2018, un membre du Movimiento Ríos Vivos Antioquia à Ituango a reçu un message de menaces adressé aux défenseur-ses des droits humains Genaro de Jesus Graciano et Isabel Cristina Zuleta. En outre, les membres du mouvement ont appris qu'un tract contenant des menaces a été distribué par le groupe paramilitaire Autodefensas Gaitanistas de Colombia - AGC, et dans lequel les membres du Movimiento Rios Vivos sont déclarés comme des "cibles militaires".

Le Movimiento Ríos Vivos Antioquia (MRVA) est un mouvement de défense des droits humains composé de 15 associations et familles dans l'ouest, le nord et le bas Cauca, dans le département d'Antioquia, affectées par l'impact négatif sur l'environnement et les droits humains du projet hydroélectrique Hidroituango. Le projet en cours de construction sur la rivière Cauca est l'un des plus grands barrages en Amérique Latine. Le chantier est mené par Empresa Públicas de Medellin - EPM (Entreprise publique de Medellin) et concerne plus de 26000 hectares de terres dans 19 municipalités de la région. La région en question est depuis longtemps en proie à la violence et au conflit armé. Depuis 10 ans, le MRVA dénonce l'impact négatif du projet "Hidroituango" et à cause de cela, les droits des membres du mouvement et de leur famille sont bafoués, notamment par le biais de menaces de mort, campagnes de diffamation, criminalisation, actes d'intimidation et assassinats. MRVA était l'un des gagnants du Prix national 2018 pour la défense des droits humains en Colombie.

Le 25 octobre 2018, un inconnu, vêtu d'un gilet de moto-taxi, s'est approché d'un jeune membre du MRVA à Ituango pour lui remettre un message menaçant adressé à Genaro de jesus et à Isabel Cristina Zuleta. Les défenseur-ses des droits humains sont co-fondateurs et membres actifs du mouvement. L'homme a dit que tous les membres devraient cesser leur activisme et que plus personne ne devrait rejoindre le mouvement. L'homme a aussi employé des expressions telles que "les gens qui ne déconnent pas avec le barrage n'ont pas de problème" (personas que no se meten con la represa no se meten en problemas) et a indiqué que les mesures de protection dont bénéficie la défenseuse Isabel Zuleta étaient bien connues et qu'elles ne suffiraient pas si elle revenait à Ituango. L'homme faisait référence aux mesures de protection mises en place par l'Unidad Nacional de Protección - UNP (Unité nationale de protection). Le 26 octobre 2018, les membres du mouvement ont été informés de l'existence d'un nouveau tract distribué par les Autodefensas Gaitanistas de Colombia et dans lequel le MRVA est déclaré, entre autre, comme une cible militaire.

Le Movimiento Rios Vivos Antioquia a fait part de ses préoccupations à de nombreuses reprises quant à l'absence d'enquête du parquet sur les attaques contre ses membres. La situation générale est de plus en plus dangereuse pour les membre du MRVA. Les défenseur-ses des droits humains et leurs proches subissent des attaques, sont stigmatisés et persécutés, et notamment par de hauts fonctionnaires. Le 22 septembre 2018, deux proches de membres du Movimiento Ríos Vivos Antioquia ont été assassinés. En mai 2018, deux défenseurs et deux de leurs proches ont été assassinés : Hugo Albeiro George Pérez a été tué avec son neveu et Luis Alberto Torres a été tué avec son frère. Ces dernières menaces sont proférées dans un contexte où le mouvement est stigmatisé par des agents de l'administration d'Ituango  Le gouverneur d'Antioquia a fait plusieurs déclarations publiques contre le mouvement.

Ce n'est pas la première fois que Front Line Defenders fait par de ses inquiétudes concernant des attaques contre les membres du MRVA. En septembre, Front Line Defenders a souligné que l'absence d'enquête correcte sur les attaques et la stigmatisation incessante du MRVA pourraient conduire à une hausse encore plus grave de la violence contre le mouvement et encourager les agresseurs à poursuivre ces actions. Front Line Defenders reste extrêmement préoccupée par les menaces, campagnes de diffamation et toutes les attaques contre les membres du Movimiento Ríos Vivos Antioquia par des responsables publics et des acteurs non étatiques.

Front Line Defenders exhorte les autorités colombiennes à :

1. Prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour garantir l'intégrité physique et psychologique et la sécurité des membres du MRVA, en accord avec tous-tes les défenseur-ses des droits humains concernés ;

2. Appliquer les mesures politiques et matérielles décidées dans le plan collectif de prévention et de protection du MRVA ;

3. Ouvrir immédiatement une enquête approfondie et impartiale sur les agressions des membres du MRVA, dans le but de publier les résultats et de traduire les responsables en justice conformément aux normes internationales ;

4. S'abstenir de stigmatiser le travail des défenseur-ses des droits humains, en particulier les activités menées par les leaders du Movimiento Ríos Vivos Antioquia ;

5. Garantir qu’en toutes circonstances, tous-tes les défenseur-ses des droits humains en Colombie, puissent mener à bien leurs actions légitimes en faveur des droits humains, sans craindre ni restrictions ni représailles.